Par Pierre-Luc Beauchesne
Gowling Lafleur Henderson s.e.n.c.r.l., s.r.l.
Dans la décision Sports Experts
2000 Inc. c. Riocan Holdings (Québec)
Inc. (2012 QCCS 4478), les demanderesses ont présenté une requête pour
interrogatoire après défense du représentant de la mise en cause. Le Tribunal a
permis l’interrogatoire concluant que la mise en cause avait consenti lors de
la première entente sur le déroulement de l’instance à ce que son représentant
soit interrogé. De plus, le Tribunal est d’avis que la mise en cause doit être
considérée comme une partie au litige étant donné que certaines des conclusions
de la requête introductive d’instance peuvent affecter ses droits et qu’une
mise en cause qui participe activement à un litige peut être considérée comme
partie à ce litige.
Les faits
La Cour rappelle tout d’abord que l’entente sur le déroulement de
l’instance constitue un contrat judiciaire qui doit être respecté en tout
point. Par conséquent, lorsqu’une entente sur le déroulement de l’instance
prévoit la tenue d’un interrogatoire au préalable, une partie ne peut refuser
de se soumettre à cet interrogatoire :
« [10] Ainsi, dès qu'une entente sur le
déroulement d'instance prévoit la tenue d'un interrogatoire au préalable,
l'article 396 C.p.c. ne peut servir de moyen pour y faire échec.
[11] Dans Cerisière
c. Proulx, la Cour d'appel précise
que lorsqu'un interrogatoire a été convenu dans une entente sur le déroulement
d'instance, il n'est pas nécessaire de demander l'autorisation du Tribunal pour
procéder à pareil interrogatoire: La
Cour d'appel, sous la plume de la juge Thérèse Rousseau-Houle rendant jugement
pour la majorité, précise:
« [25] Vu
l’entente entre les parties sur le déroulement de l’instance (article 404
C.p.c. et 151.1 et s. C.p.c.), il n’était pas nécessaire d’obtenir
l’autorisation du Tribunal pour interroger Lemelin. Son interrogatoire pouvait
toutefois donner lieu à des objections qui devaient être tranchées par un juge. »
[12] En l'espèce, c'est le refus de Sail de
consentir à un tel interrogatoire qui force les demanderesses à présenter leur
requête.
[13] Sail plaide que cet interrogatoire ne
devait avoir lieu que si elle avait produit une défense. Cet argument ne tient pas. En effet, dans la première entente, il n'y
avait aucune réserve en ce sens. Le fait
que dans la deuxième entente, les procureurs de Sail aient ajouté que la mise
en cause se réservait le droit de ne pas produire une défense ne modifie pas le
contrat judiciaire, car même dans cette deuxième entente, l'on prévoit toujours
un interrogatoire d'un représentant de Sail.
De surcroît, cette modification mineure ambiguë ne saurait faire perdre
aux demanderesses le droit à cet interrogatoire. » [références omises]
Le Tribunal soulève ensuite que certaines des conclusions recherchées
par les demanderesses étaient susceptibles d’affecter les droits de la mise en
cause. De plus la mise en cause avait
présenté un moyen de non-recevabilité demandant à la cour de rejeter l’action
des demanderesses quant auxdites conclusions. La Cour arrive conclut donc que
la mise en cause peut être considérée comme une partie à ce litige :
« [17] Or, Sail a non seulement présenté
un moyen de non-recevabilité, mais au surplus était présente aux
interrogatoires préalables ayant lieu jusqu'à date, a posé des questions aux
représentants interrogés et a même formulé des objections.
[18] Au surplus, dans son moyen de non-recevabilité,
Sail a demandé au Tribunal de rejeter avec dépens la requête introductive
d'instance des demanderesses en regard des conclusions qui la
concernaient. Or, en vertu de l'article
477 C.p.c., seule une partie au litige peut réclamer ou se voir condamner des
dépens.
[19] En l'espèce, le juge Décarie a rejeté sa
requête avec dépens. D'ailleurs, telle
que la jurisprudence l'a reconnu, une mise en cause qui participe activement à
un litige peut être considérée comme partie à ce litige et se voir accorder des
dépens ou même en subir.
[20] Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal
conclut que Sail doit être considérée comme une partie au litige. En conséquence, les demanderesses ont le
droit d'interroger au préalable son représentant. » [références omises]
Le Tribunal termine son analyse en avançant que même si la mise en cause
n’était pas une partie au litige mais un tiers, il aurait permis
l’interrogatoire vu le contexte factuel et le principe à l’effet qu’il faut
favoriser la divulgation la plus complète de la preuve.
Le texte intégral de la décision se retrouve ici.
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