Par Pierre-Luc
Beauchesne
Gowling Lafleur
Henderson s.e.n.c.r.l., s.r.l.
Dans M.C. (Syndic de) (2013 QCCS 102), la
Cour supérieure était saisie d’une requête de la débitrice en modification des
conditions d’une ordonnance de libération selon l’article 172.1 de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité. La Cour a rejeté la demande en modification
considérant que la débitrice « évite de faire de l’argent » afin que
ses créanciers ne soient pas remboursés.
Faits
La débitrice et
l’opposant ont fait vie commune pendant 10 ans et ont eu
2 enfants. En 2004, des procédures
judiciaires pour garde et accès se sont transformées en véritable saga. Pendant les procédures, la débitrice a vendu
le dépanneur dont elle et l’opposant étaient propriétaires et a voulu conserver
le produit de la vente. La Cour avait conclu que la débitrice a voulu
déposséder l’opposant et l’avait ainsi fraudé. La débitrice a par la suite
déposé une proposition, puis a fait faillite. Le Tribunal a considéré que la
faillite de la débitrice était frauduleuse. Le 9 juin 2009, la Cour a
assorti la libération éventuelle de la débitrice à l’obligation de payer à la
masse de ses créanciers une somme supplémentaire de 50 000 $. La Cour
d’appel a confirmé ce jugement le 18 novembre 2010.
La débitrice demande sa
libération de la faillite au motif qu’elle est incapable de payer la somme de
50 000 $.
Analyse
Le Tribunal remarque
tout d’abord que la débitrice n’a offert aucun montant afin de s’acquitter de
sa dette.
Rappelant les
principes en matière de modification d’ordonnances de libération, la Cour
refuse de modifier l’ordonnance de libération de la débitrice :
« [16] Il serait en effet injuste pour les créanciers qu'un
débiteur se serve de la Loi sur la faillite pour éluder ses obligations, soit
en cachant des biens, soit en utilisant les tribunaux ou des tiers complices
pour frauder.
[17] Même si la loi prévoit qu'un failli qui a été malchanceux ou
infortuné ne doive pas désespérer d'être un jour libéré de façon à refaire sa
vie, elle ne saurait, comme dans la situation d'ici, permettre à un failli de
déjouer le système et de se tirer de dettes ou d'obligations par ruse, fraude
ou complot.
[18] Dans une affaire de 2003, la juge Bédard reprenait les écrits des
auteurs Boucher et Fortin qui s'exprimaient comme suit au sujet des demandes en
modifications des termes d'ordonnances de libération :
« [9] L'article 172(3) de la Loi sur la faillite et
l'insolvabilité prévoit qu'après un an, le Tribunal peut modifier les
conditions d'une ordonnance de libération.
C'est à celui qui requiert la modification d'en faire la preuve. Comme le rappellent les auteurs Boucher et
Fortin,
« Avant de modifier les termes d'une ordonnance de libération, le
tribunal doit se convaincre de la présence des éléments suivants : (1) un
changement de circonstances pour des raisons hors du contrôle du failli survenu
depuis l'ordonnance de libération; (2) une preuve suffisante à l'effet que le
failli n'est pas en mesure de se conformer aux conditions de l'ordonnance de
libération; (3) le failli est crédible; (4) la démonstration que le failli a de
bonne foi tenté de respecter les termes de l'ordonnance de libération. »
Re Cowie (1991), 6 C.B.R. (3d) 227 (Ont. Bktcy.).
Re Abelson (1989), 76 C.B.R. (N.S.) 120 (Ont. S.C.).
Re Whyte (1980), 35 C.B.R. (N.S.) 194 (Ont. S.C.).[3] »
[19] Or ici, il n'y a aucun changement de circonstances pour des raisons
hors du contrôle de la faillie. Elle est
dans la même situation que celle d'avant le jugement du juge Béliveau, ayant
choisi de continuer de faire des études dans un autre domaine que celui où elle avait déjà été formée, soit
un DEC en techniques administratives avec option finances. Le tribunal ne croit
pas ses explications de retard dans sa connaissance de la technologie, pas plus
que son manque de fluidité alléguée en langue anglaise.
[20] Il saute aux yeux qu'elle a choisi de faire ce qu'elle fait depuis
4 ans pour éviter de faire de l'argent, ce qui lui évite de devoir payer
quoi que ce soit à monsieur. Elle résiste et conteste toujours les conclusions
des jugements du juge Béliveau, même si ses avenues lui sont de moins en moins
ouvertes.
[21] Elle n'est donc pas crédible dans ses explications et sa bonne foi
semble plus que douteuse, surtout quand on voit tout ce qu'elle a fait et
essayé dans les dossiers, tel que déterminé par le juge Béliveau.
[22] Ainsi, et pour ces motifs, le soussigné ne croit pas qu'il faille
libérer, pour l'instant, madame de la condition imposée par le juge Béliveau. »
Le texte intégral de
la décision est disponible ici.
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