par Marie-Hélène Beaudoin
McCarthy Tétrault
Eh bien oui,
aujourd’hui, sur le Blogue du CRL, on vous parle de météo. Fred la marmotte du
Québec a vu son ombre cette année, à ce qu’il parait,
et Dame Nature nous a récemment confirmé (en nous enneigeant un brin) que nous
n’aurions pas un printemps hâtif. Comme nous sommes toujours à l’affût des sujets
brûlants de l’actualité, nous consacrons cette chronique à… la neige.
D’abord, au cas où
vous le demandiez : non, la neige dans le Grand Nord québécois, ce n’est
pas une force majeure. C’est du moins ce qu’a conclu la Cour supérieure dans
l’affaire Commission scolaire Kativik
c. Roy, 2006
QCCS 1887 :
« [8]
Par ailleurs, la preuve entendue par l'arbitre ne permet pas de conclure
objectivement qu'une tempête de neige au mois de mars au Nunavik constitue une
force majeure. Au contraire, il s'agit d'un événement récurrent et prévisible.
Sa conséquence, soit d'empêcher les déplacements entre une localité et une
autre, est aussi prévisible. »
Et si vous pensiez demander
une injonction contre votre voisin pour qu’il retire son abri ®Tempo, duquel la
neige tomberait sur votre terrain, il serait peut-être opportun de réviser
cette position à la lumière de l’affaire Zakharian
c. Shahwan, 2012
QCCS 6398 :
« [11] Il ne fait aucun doute pour le Tribunal
qu'une telle situation n'aurait jamais dû se retrouver à la Cour. D'ailleurs,
la juge Sophie Picard, j.c.s., lors d’une audience le 13 mars 2012, avait
fortement suggéré aux parties d'aller en conférence de règlement « settlement
conference ».
[12] Toutefois, à défaut d'entente, les règles de
droit doivent disposer du litige.
[…]
[14] Zakharian exige l’enlèvement de l’abri Tempo
de son voisin puisqu’il n’existe aucune autre solution soutient-il.
[…]
[17] La preuve présentée par Shahwan et non
contredite par Zakharian veut que ce dernier interdise l’accès des défendeurs à
son terrain, alors que ces derniers veulent enlever l’accumulation de neige.
Zakharian préfère prendre des photos afin de faciliter sa preuve de dommages
pour ses réclamations aux petites créances.
[…]
[28] Zakharian a affirmé devant cette Cour qu'il
n'avait pas l'intention de laisser Shahwan venir chez lui déblayer la neige,
car cela le priverait de la possibilité de faire la preuve des inconvénients
qu’il subit chaque hiver, lui permettant ainsi de faire des réclamations aux
petites créances.
[…]
[30] Zakharian et Shahwan ont signé un contrat de
déneigement avec le même entrepreneur. Ainsi, la preuve révèle que lors d’une
tempête de neige, les Shawan accourent pour faire tomber la neige accumulée sur
le toit du Tempo afin qu’elle puisse être retirée au moment où le déneigeur
nettoie les deux (2) entrées mitoyennes.
[31] Par ailleurs, la preuve non contredite veut
que les défendeurs offrent de nettoyer ce que le déneigeur ne peut faire près
du Tempo, mais encaissent un refus à chaque reprise. L’argument de Zakharian
voulant que ça ne lui convienne pas d’enlever sa voiture pour permettre le
déneigement proposé par Shahwan ne tient pas puisqu’il doit de toute façon
dégager l’entrée pour le déneigeur qui passe avec son équipement.
[32] Le Tribunal déplore qu’une telle situation
se soit retrouvée tant en Cour du Québec qu’en Cour supérieure. Entre personnes
de bonne volonté, un problème de cette nature devrait trouver solution.
[…]
[34] Existe-t-il une solution pour mettre fin à
ce litige tout en permettant d’harmoniser les relations futures de ces voisins?
[35] Le Tribunal a proposé aux deux parties un
Tempo double couvrant les deux (2) entrées. Immédiatement, les Shahwan ont
accepté la proposition et offert d’assumer 50% du coût.
[36] Le Tribunal n'a jamais obtenu de réponse de
Zakharian. Ce dernier se butant à dire que l’abri lui cause des inconvénients.
[…]
[…]
[40] Les Shawan ont à nouveau proposé devant le
Tribunal de nettoyer la neige se retrouvant sur le terrain du demandeur lors
d’une tempête. Zakharian exige alors que quelqu’un soit disponible 24 heures
sur 24, à la minute près, à la moindre neige et à la moindre goutte d’eau
pouvant faire de la glace sur son terrain lors des variations de température.
[41] Le Tribunal conclut que Zakharian ne cherche
aucune solution, mais plutôt la confrontation. Il est malheureusement la source
principale du litige.
[…]
[45] L’article 976 du Code civil du Québec
précise que les voisins doivent accepter les inconvénients normaux de voisinage
qui n’excèdent pas les limites de la tolérance qu'ils se doivent, et ce,
suivant la nature ou la situation de leurs fonds ou suivant les usages locaux.
[46] Le Tribunal est d’avis que les faits
reprochés par Zakharian aux Shahwan font partie des inconvénients normaux de
voisinage. Ces derniers offrent de minimiser les inconvénients en enlevant la
neige tant par le déneigeur conjoint que par eux-mêmes. Rien dans la preuve
présentée par Zakharian n'a démontré une faute quelconque de la part des
défendeurs permettant de conclure à l’enlèvement de l'abri Tempo.
[47] Zakharian a fait la preuve devant le
Tribunal de son intransigeance et s’il en subit des dommages, il est l'auteur
de son propre malheur. »
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