PÉNAL
(DROIT) : L'article 151 a) C.Cr., qui prévoit une peine minimale de
12 mois de détention, est déclaré inopérant dans le cas de l'accusé, qui
s'est reconnu coupable d'attouchements sexuels à l'égard d'une jeune fille de
13 ans alors qu'il était lui-même âgé de 18 ans et vivait une
relation amoureuse avec celle-ci.
2016EXP-3477
Intitulé : R. c. Jomphe, 2016 QCCQ 11271
Juridiction : Cour du Québec, Chambre criminelle et pénale (C.Q.), Rimouski (Amqui),
120-01-006091-148
Décision de : Juge Richard Côté
Date : 30 septembre 2016
Références : SOQUIJ AZ-51331066, 2016EXP-3477, J.E. 2016-1895 (14 pages)
PÉNAL (DROIT) —
garanties fondamentales du processus pénal — droit à la protection contre tous
traitements ou peines cruels et inusités — peine minimale obligatoire —
attouchements sexuels — victime âgée de moins de 16 ans — fille âgée de
13 ans — accusé âgé de 18 ans — consentement des parents —
constitutionnalité — article 151 C.Cr. — violation de l'article 12 de la Charte
canadienne des droits et libertés — déclaration d'inopérabilité
constitutionnelle.
PÉNAL (DROIT) —
détermination de la peine — principes généraux — les peines et la Charte
canadienne des droits et libertés — droit à la protection contre tous
traitements ou peines cruels et inusités — peine minimale obligatoire —
détention — attouchements sexuels — victime âgée de moins de 16 ans —
fille âgée de 13 ans — accusé âgé de 18 ans — consentement des
parents — constitutionnalité — article 151 C.Cr. — violation de l'article 12 de
la Charte canadienne des droits et libertés — déclaration
d'inopérabilité constitutionnelle.
DROITS ET LIBERTÉS
— droits judiciaires — protection contre tous traitements ou peines cruels et
inusités — peine minimale obligatoire — attouchements sexuels — détention —
constitutionnalité — article 151 C.Cr. — déclaration d'inopérabilité
constitutionnelle.
DROITS ET LIBERTÉS
— réparation du préjudice — déclaration d'inopérabilité constitutionnelle —
attouchements sexuels — détention — peine minimale obligatoire —
constitutionnalité — article 151 C.Cr.
Contestation constitutionnelle de la
peine minimale obligatoire de 12 mois prévue à l'article 151 du Code
criminel (C.Cr.). La disposition est déclarée inconstitutionnelle et
inopérante en ce qui concerne l'accusé.
L'accusé s'est reconnu coupable
d'agression sexuelle (art. 271 a) C.Cr.) et d'attouchement sexuel sur
la personne d'une enfant âgée de moins de 16 ans (art. 151 a)
C.Cr.) à la suite de faits survenus en 2014. Il a connu la victime alors qu'il
était âgé de 18 ans et elle, de 13 ans. Leurs mères respectives ont
consenti à leurs fréquentations. Ils ont été en couple pendant environ trois
mois et ont eu cinq ou six relations sexuelles complètes, de façon
consensuelle, dépourvues de toute violence physique extrinsèque ou de pression
psychologique. L'article 151 a) C.Cr. prévoit une peine minimale
obligatoire de 12 mois d'emprisonnement. La défense soutient que les
articles 151 et 271 C.Cr. violent le droit de l'accusé à la protection contre
les peines cruelles et inusitées prévu à l'article 12 de la Charte
canadienne des droits et libertés.
Décision
Le processus d'analyse qui doit être suivi lors d'une contestation constitutionnelle fondée sur l'article 12 de la charte est celui élaboré par la Cour suprême dans R. c. Nur (C.S. Can., 2015-04-14), 2015 CSC 15, SOQUIJ AZ-51166481, 2015EXP-1133, J.E. 2015-622, [2015] 1 R.C.S. 773. Si, au terme de cette analyse, la disposition est jugée incompatible avec l'article 12 de la charte, elle sera déclarée inopérante dans le cas de l'accusé, à moins que la poursuite ne réussisse à justifier la validité de la disposition en vertu de l'article premier de la charte. Dans Perron c. R.(C.A., 2015-04-07), 2015 QCCA 601, SOQUIJ AZ-51166159, 2015EXP-1204, J.E. 2015-664, la Cour d'appel a retenu une fourchette des peines variant de 3 à 48 mois. Cela dit, en l'espèce, le fait qu'il s'agisse de rapports sexuels complets et le fait que cela constitue un mauvais traitement à l'égard d'une personne âgée de moins de 18 ans sont des circonstances aggravantes. D'autre part, il faut retenir à titre de circonstances atténuantes le plaidoyer de culpabilité de l'accusé et l'absence d'antécédents judiciaires au moment des infractions. De plus, il ne s'agit pas d'un cas d'exploitation sexuelle d'une adolescente par un adulte placé dans une situation de confiance ou d'autorité. Ce sont des actes sexuels prohibés qui, bien qu'ils soient criminels, ont été commis par un jeune adulte de 18 ans à l'encontre d'une adolescente de 13 ans dans le contexte d'une relation amoureuse consensuelle approuvée et encouragée par les parents, autant du côté de la victime que de celui de l'accusé. Il n'est pas question de violence psychologique ni de violence physique au-delà de celle qui est intrinsèque aux infractions. Par ailleurs, il n'y a pas de preuve de séquelles psychologiques chez la victime. Compte tenu de ces circonstances particulières, il n'y a pas lieu d'accorder un caractère déterminant aux objectifs de dénonciation et de dissuasion. Une peine juste et proportionnée comporterait une peine d'emprisonnement de 90 jours assortie d'une probation de 2 ans. Par conséquent, non seulement la peine minimale obligatoire de 12 mois d'emprisonnement est excessive mais elle constitue, dans le cas de l'accusé, une peine totalement disproportionnée qui viole son droit d'être protégé contre les peines cruelles et inusitées prévu à l'article 12 de la charte. Malgré cette conclusion, compte tenu des hypothèses d'application à d'autres personnes soumises par la défense, il y aurait lieu de conclure que l'atteinte au droit prévu à l'article 12 n'est pas justifiée par l'article premier. Les dispositions sur la peine minimale obligatoire prévue à l'article 151 C.Cr. couvrent une grande variété de comportements. À une extrémité de la gamme se trouve un attouchement consensuel de peu de gravité commis par un jeune adulte à l'encontre d'une adolescente et, à l'autre extrémité, des rapports sexuels complets commis par un adulte d'âge mûr en situation d'autorité contre un enfant vulnérable. Alors que, dans la plupart des situations visées par la disposition, la peine minimale obligatoire ne pourra être qualifiée d'excessive, elle devient totalement disproportionnée et intolérable dans les situations où le comportement en cause se situe au bas de l'échelle de gravité. Même si l'objectif visé par le législateur, soit de prévenir l'exploitation des enfants et des personnes vulnérables en emprisonnant les personnes qui commettent des crimes sexuels contre les personnes mineures, est important, cela ne justifie pas l'imposition de peines totalement disproportionnée à certaines personnes. L'atteinte au droit prévu à l'article 12 n'est donc pas justifiée sous l'article premier de la charte.
Le processus d'analyse qui doit être suivi lors d'une contestation constitutionnelle fondée sur l'article 12 de la charte est celui élaboré par la Cour suprême dans R. c. Nur (C.S. Can., 2015-04-14), 2015 CSC 15, SOQUIJ AZ-51166481, 2015EXP-1133, J.E. 2015-622, [2015] 1 R.C.S. 773. Si, au terme de cette analyse, la disposition est jugée incompatible avec l'article 12 de la charte, elle sera déclarée inopérante dans le cas de l'accusé, à moins que la poursuite ne réussisse à justifier la validité de la disposition en vertu de l'article premier de la charte. Dans Perron c. R.(C.A., 2015-04-07), 2015 QCCA 601, SOQUIJ AZ-51166159, 2015EXP-1204, J.E. 2015-664, la Cour d'appel a retenu une fourchette des peines variant de 3 à 48 mois. Cela dit, en l'espèce, le fait qu'il s'agisse de rapports sexuels complets et le fait que cela constitue un mauvais traitement à l'égard d'une personne âgée de moins de 18 ans sont des circonstances aggravantes. D'autre part, il faut retenir à titre de circonstances atténuantes le plaidoyer de culpabilité de l'accusé et l'absence d'antécédents judiciaires au moment des infractions. De plus, il ne s'agit pas d'un cas d'exploitation sexuelle d'une adolescente par un adulte placé dans une situation de confiance ou d'autorité. Ce sont des actes sexuels prohibés qui, bien qu'ils soient criminels, ont été commis par un jeune adulte de 18 ans à l'encontre d'une adolescente de 13 ans dans le contexte d'une relation amoureuse consensuelle approuvée et encouragée par les parents, autant du côté de la victime que de celui de l'accusé. Il n'est pas question de violence psychologique ni de violence physique au-delà de celle qui est intrinsèque aux infractions. Par ailleurs, il n'y a pas de preuve de séquelles psychologiques chez la victime. Compte tenu de ces circonstances particulières, il n'y a pas lieu d'accorder un caractère déterminant aux objectifs de dénonciation et de dissuasion. Une peine juste et proportionnée comporterait une peine d'emprisonnement de 90 jours assortie d'une probation de 2 ans. Par conséquent, non seulement la peine minimale obligatoire de 12 mois d'emprisonnement est excessive mais elle constitue, dans le cas de l'accusé, une peine totalement disproportionnée qui viole son droit d'être protégé contre les peines cruelles et inusitées prévu à l'article 12 de la charte. Malgré cette conclusion, compte tenu des hypothèses d'application à d'autres personnes soumises par la défense, il y aurait lieu de conclure que l'atteinte au droit prévu à l'article 12 n'est pas justifiée par l'article premier. Les dispositions sur la peine minimale obligatoire prévue à l'article 151 C.Cr. couvrent une grande variété de comportements. À une extrémité de la gamme se trouve un attouchement consensuel de peu de gravité commis par un jeune adulte à l'encontre d'une adolescente et, à l'autre extrémité, des rapports sexuels complets commis par un adulte d'âge mûr en situation d'autorité contre un enfant vulnérable. Alors que, dans la plupart des situations visées par la disposition, la peine minimale obligatoire ne pourra être qualifiée d'excessive, elle devient totalement disproportionnée et intolérable dans les situations où le comportement en cause se situe au bas de l'échelle de gravité. Même si l'objectif visé par le législateur, soit de prévenir l'exploitation des enfants et des personnes vulnérables en emprisonnant les personnes qui commettent des crimes sexuels contre les personnes mineures, est important, cela ne justifie pas l'imposition de peines totalement disproportionnée à certaines personnes. L'atteinte au droit prévu à l'article 12 n'est donc pas justifiée sous l'article premier de la charte.
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