PÉNAL (DROIT) : À la lumière de R. c. Jordan (C.S. Can.,
2016-07-08), 2016 CSC 27, SOQUIJ AZ-51302609, 2016EXP-2173, J.E. 2016-1212, le
tribunal retient la complexité de l'affaire et rejette la requête en arrêt des
procédures dans le cas des politiciens, fonctionnaires, ingénieurs,
entrepreneurs et collecteurs de fonds impliqués dans le scandale de fraude et
de corruption à la Ville de Laval.
2017EXP-716
Intitulé : Duplessis c. R., 2017
QCCS 606
Juridiction : Cour supérieure (C.S.),
Laval, 540-01-059861-131
Décision de : Juge James L. Brunton
Date : 16 février 2017
Références : SOQUIJ AZ-51367006,
2017EXP-716 (29 pages)
PÉNAL (DROIT) — procédure pénale — procédure fédérale — arrêt des
procédures — corruption — abus de confiance — fraude — attribution de contrats
par la Ville de Laval — délai déraisonnable (58 mois) — application du
cadre d'analyse de R. c. Jordan (C.S. Can., 2016-07-08), 2016 CSC 27,
SOQUIJ AZ-51302609, 2016EXP-2173, J.E. 2016-1212 — délai supérieur au plafond
présumé — circonstances exceptionnelles — événement distinct — Loi visant
principalement la récupération des sommes payées injustement à la suite de
fraudes ou de manoeuvres dolosives dans le cadre de contrats publics —
complexité de l'affaire — nombre d'accusés — importance de la preuve — mesure
transitoire exceptionnelle — état du droit tel qu'il existait — district
judiciaire — délai systémique.
PÉNAL (DROIT) — garanties fondamentales du processus pénal — droit
d'être jugé dans un délai raisonnable — corruption — abus de confiance — fraude
— attribution de contrats par la Ville de Laval — délai déraisonnable
(58 mois) — application du cadre d'analyse de R. c. Jordan (C.S.
Can., 2016-07-08), 2016 CSC 27, SOQUIJ AZ-51302609, 2016EXP-2173, J.E.
2016-1212 — délai supérieur au plafond présumé — circonstances exceptionnelles
— événement distinct — Loi visant principalement la récupération des sommes
payées injustement à la suite de fraudes ou de manoeuvres dolosives dans le
cadre de contrats publics — complexité de l'affaire — nombre d'accusés —
importance de la preuve — mesure transitoire exceptionnelle — état du droit tel
qu'il existait — district judiciaire — délai systémique — arrêt des procédures.
DROITS ET LIBERTÉS — droits judiciaires — personne arrêtée ou détenue —
droit d'être jugé dans un délai raisonnable — corruption — abus de confiance —
fraude — attribution de contrats par la Ville de Laval — délai déraisonnable
(58 mois) — application du cadre d'analyse de R. c. Jordan (C.S.
Can., 2016-07-08), 2016 CSC 27, SOQUIJ AZ-51302609, 2016EXP-2173, J.E.
2016-1212 — délai supérieur au plafond présumé — circonstances exceptionnelles
— événement distinct — Loi visant principalement la récupération des sommes
payées injustement à la suite de fraudes ou de manoeuvres dolosives dans le
cadre de contrats publics — complexité de l'affaire — importance de la
preuve — mesure transitoire exceptionnelle — état du droit tel qu'il existait —
district judiciaire — délai systémique — arrêt des procédures.
Requête en arrêt des procédures pour cause de délai déraisonnable en
vertu de l'article 11 b) de la Charte canadienne des droits et
libertés. Rejetée.
Le 9 mai 2013, les autorités ont lancé 37 mandats
d'arrestation pour corruption, abus de confiance, fraude envers le gouvernement
et recel en rapport avec l'attribution de contrats de construction sur le
territoire de la Ville de Laval. Parmi les accusés, il y avait des politiciens,
des fonctionnaires, des ingénieurs, des entrepreneurs en construction et des
collecteurs de fonds. Trente-trois accusés ont été divisés en deux groupes. Le
premier procès regroupe les politiciens, fonctionnaires, ingénieurs,
collecteurs de fonds et ceux chargés des «points de chute». Le requérant
Duplessis fait partie de ce premier groupe. Le début de ce procès est prévu
pour le 5 septembre 2017. La durée anticipée de celui-ci est de six mois.
Le délai entre la mise en accusation et la conclusion anticipée du procès est
de 58 mois. Le deuxième procès regroupera les entrepreneurs. Le début de
ce procès est prévu pour le 8 octobre 2017 et sa durée anticipée est de
six mois. Le délai entre la mise en accusation et la conclusion anticipée du
procès est de 59 mois.
Décision
Quant aux renonciations à invoquer certains délais, la période comprise
entre janvier et avril 2015 inclusivement, soit celle survenue au moment de
fixer les dates de l'enquête préliminaire, ainsi que celle comprise entre
septembre 2015 et janvier 2016, soit lorsque le dossier a abouti à la Cour
supérieure à la suite de la citation à procès, sont des renonciations
explicites, claires et sans équivoque quant aux délais écoulés.
Quant aux délais causés par la défense, il n'y a pas lieu d'inclure
celui écoulé en raison de la présentation d'une requête en certiorari.
En accueillant la requête, la Cour supérieure a reconnu l'excès de
compétence allégué et la nécessité de la défense d'examiner la preuve avant de
prendre des décisions importantes sur le déroulement de l'instance. Par
conséquent, la conclusion anticipée du premier procès aura lieu 51 mois
après la mise en accusation, et 52 mois dans le cas du deuxième procès.
Dans chaque cas, le plafond de 30 mois établi dans Jordan
est dépassé et, par conséquent, ces délais sont présumés déraisonnables. Il
revenait dès lors à l'intimée de réfuter cette présomption en démontrant que ce
délai est raisonnable, compte tenu des circonstances exceptionnelles.
À cet égard, le tribunal ne retient pas que les effets résultant du
passage de la Loi visant principalement la récupération des sommes payées
injustement à la suite de fraudes ou de manoeuvres dolosives dans le cadre de
contrats publics constituent un événement distinct. En outre, il est vrai
que le présent juge, à la suite de sa nomination à titre de juge gestionnaire,
a fait référence à l'existence de la loi au moment de fixer un échéancier.
Cependant, une fois tous les facteurs pertinents examinés, il y a lieu de
conclure que l'échéancier aurait été identique, même si le présent tribunal
n'avait pas été préoccupé par les effets de la loi.
Quant à savoir s'il s'agit d'une affaire particulièrement complexe, il
est objectivement raisonnable d'avoir regroupé les politiciens, fonctionnaires,
ingénieurs, entrepreneurs et collecteurs dans la même dénonciation, malgré leur
nombre. Cette décision est conforme au principe de base voulant que des
personnes accusées d'avoir agi illégalement dans une aventure commune soient
jugées conjointement. La criminalité alléguée a duré 14 ans. La quantité
de preuve nécessaire à communiquer témoigne de la complexité particulière du
dossier en ce qui concerne les accusés identifiés aux politiciens,
fonctionnaires, ingénieurs, entrepreneurs et collecteurs. Cette conclusion, par
contre, ne s'applique pas à ceux identifiés exclusivement avec les «points de
chute». Dans ce dernier cas, leur inclusion dans la dénonciation initiale et
l'acte d'accusation a créé artificiellement un dossier d'une complexité
particulière. L'intimée a toujours démontré qu'elle avait un plan adéquat pour
gérer le dossier et le faire avancer le plus rapidement possible. Il y a lieu
de conclure que le dossier est particulièrement complexe et que l'intimée a
respecté les mises en garde formulées par la Cour suprême dans Jordan en
ce qui concerne les accusés qui sont des politiciens, des fonctionnaires, des
ingénieurs, des entrepreneurs et des collecteurs.
Les délais ne sont pas déraisonnables pour ces accusés, y compris le
requérant.
Enfin, si la conclusion était que le présent dossier n'est pas
particulièrement complexe, il y aurait lieu d'appliquer les mesures transitoires
exceptionnelles prévues dans Jordan. En outre, l'intimée a démontré que
les parties se sont raisonnablement conformées au droit tel qu'il existait.
Cela dit, à la lumière de R. c. Last (C.S. Can., 2009-10-15), 2009 CSC
45, SOQUIJ AZ-50579351, J.E. 2009-1893, [2009] 3 R.C.S. 146, il est clair que
le requérant doit subir un procès conjoint avec ses coaccusés. Sa demande de
subir un procès séparé est rejetée.
NDLR : La décision rendue dans Asselin
c. R. et concernant d'autres accusés est diffusée à SOQUIJ AZ-51367005 et
résumée au 2017EXP-717 (dossier no 540-01-059861-131). Les mêmes
motifs s'appliquent à la décision rendue le même jour dans Théberge c. R.
est diffusée à SOQUIJ AZ-51367004 (dossier no 540-01-059861-131).
Le texte intégral
de la décision est disponible ici
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