PRESCRIPTION EXTINCTIVE : Le recours introduit par la procureure générale du Québec (PGQ) pour obtenir le remboursement des sommes reçues par un ancien directeur général adjoint de la Sûreté du Québec dans le contexte de son départ à la retraite est rejeté, vu la prescription du droit d'action de la PGQ.
2020EXP-2016
Intitulé : Procureure générale du Québec c. Deschesnes, 2020 QCCS 2423
Juridiction : Cour supérieure (C.S.), Terrebonne (Saint-Jérôme)
Décision de : Juge Claude Champagne
Date : 5 août 2020
Références : SOQUIJ AZ-51698864, 2020EXP-2016, 2020EXPT-1406 (20 pages)
Résumé
PRESCRIPTION EXTINCTIVE — délai — travail — congédiement — indemnité de départ — entente — validité de l'entente — point de départ du calcul du délai — connaissance du droit d'action.
PROCÉDURE CIVILE — pouvoir des tribunaux de sanctionner les abus de procédure (NCPC) — recours manifestement mal fondé, frivole ou dilatoire — recours téméraire — indemnité de départ — remboursement — prescription extinctive — dommage non pécuniaire — honoraires extrajudiciaires.
TRAVAIL — responsabilité et obligations — salarié — réception de l'indu — indemnité de départ — entente — validité de l'entente — prescription extinctive — recours manifestement mal fondé, frivole ou dilatoire — abus de procédure — dommage non pécuniaire — honoraires extrajudiciaires.
DOMMAGE (ÉVALUATION) — dommage moral — abus de procédure — stress — angoisse — insomnie — perte d'estime de soi.
DOMMAGE (ÉVALUATION) — honoraires extrajudiciaires — remboursement — abus de procédure.
Demande en remboursement d'une indemnité de départ (189 431 $). Rejetée. Demande reconventionnelle en réclamation de dommages-intérêts et de dommages punitifs pour abus de procédure (375 000 $). Accueillie en partie (179 761 $).
En septembre 2008, le défendeur
Deschesnes, qui occupait le poste de directeur général de la Sûreté du Québec
(SQ), a annoncé au défendeur Fiset, qui était l'un des 4 directeurs
généraux adjoints, qu'il ne ferait plus partie de l'état-major de la SQ. Après
plusieurs discussions et des négociations, Fiset a accepté de prendre sa
retraite. La SQ devait lui verser son salaire pendant 1 an ainsi qu'une
somme forfaitaire de 21 500 $ relative à la formation, au
perfectionnement et à la réorientation de carrière.
Jugeant que l'entente conclue était illégale, la demanderesse réclame aux
défendeurs le remboursement des sommes que Fiset a reçues, soit un total de
189 431 $. Elle fait valoir qu'il n'existe aucune loi ni aucun
règlement, décret ou arrêté de conseil autorisant ce genre d'entente et que les
conditions de travail de Fiset ne prévoyaient pas non plus une telle possibilité.
Les défendeurs soutiennent que le recours de la demanderesse est prescrit
puisqu'il a été intenté plus de 7 ans après les faits. Il serait aussi
irrecevable parce que l'entente intervenue serait bonne et valable. En
conséquence, ils estiment que le recours dirigé contre eux est abusif et
réclament tous deux des dommages-intérêts qu'ils évaluent au minimum à
150 000 $ pour Fiset et à 225 000 $ dans le cas de
Deschesnes.
Décision
Alors que la demanderesse invoque la nullité de l'entente conclue entre Fiset
et la SQ, son droit d'action se prescrit par 3 ans et ce délai court à
compter de la connaissance de la cause de nullité. Or, plusieurs éléments de
preuve démontrent que le droit d'action de la demanderesse était prescrit
lorsque sa demande a été introduite, en février 2016. Notamment, l'indemnité
qu'a reçue Fiset lui a été versée en toute transparence jusqu'en mars 2010.
Aussi, lorsque Deschesnes a été démis de ses fonctions, à l'automne 2012, il a
cherché à obtenir une entente de départ semblable. Le recours de la
demanderesse était donc prescrit lorsqu'il a été introduit puisque les
autorités gouvernementales avaient depuis plus de 3 ans toutes les
informations nécessaires afin de prendre une décision dans le dossier. Bien que
ce qui précède suffise pour rejeter le recours de la demanderesse, il faut
aussi conclure que l'argent versé à Fiset lui avait légalement été accordé et
que Deschesnes avait le pouvoir d'autoriser les paiements faits à ce dernier.
Les défendeurs n'ont donc rien à rembourser à la demanderesse.
Or, il y a lieu de constater que le recours de la demanderesse était, à
l'origine, manifestement mal fondé et téméraire. Premièrement, il était
prescrit, ayant été intenté en février 2016, alors que la SQ en connaissait
tous les faits générateurs depuis novembre 2012 au plus tard. Les défendeurs
ont d'ailleurs clairement soulevé ce point dans leur défense et demande
reconventionnelle. La demanderesse devait aussi savoir que Fiset avait droit,
en vertu de l'article 2085 et ss. du Code civil du Québec, à une
indemnité de fin d'emploi puisque Deschesnes l'avait congédié de son poste de
directeur général adjoint. De plus, une enquête le moindrement sérieuse aurait
permis de découvrir que des ententes comme celle dont Fiset a bénéficié existaient
depuis plusieurs années à la SQ et que ce corps policier connaissait depuis
longtemps l'existence de celle qu'avait acceptée Fiset. Les défendeurs auront
chacun droit à 10 000 $ en dommages moraux. Quant aux honoraires que
ces derniers ont dû engager pour se défendre, ils sont justes et raisonnables,
compte tenu de toutes les circonstances, et ils leur seront remboursés.
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