Caterpillar Inc. c. Puma SE : Une histoire féline
Par Jessie McKinnon, avocate
Neuf ans après le dépôt d’une demande d’enregistrement de la marque procat par Puma SE en lien avec divers articles vestimentaires, la Cour fédérale statue que celle-ci n’est pas enregistrable dans Caterpillar Inc. c. Puma SE (2021 FC 974).
Contexte
L’histoire commence le 5 janvier 2012 alors que Puma SE (ci-après « Puma ») dépose une demande d’enregistrement pour la marque procat en lien avec divers articles vestimentaires. Le 5 octobre 2012, Caterpillar Inc. (ci-après « Caterpillar ») dépose une déclaration d’opposition à l’encontre de la demande de Puma. Caterpillar est propriétaire de la marque CAT & Triangle Design (ci-après « CAT ») enregistrée depuis 1991. Cette marque couvre certains articles vestimentaires également visés par la demande de Puma.
Les principaux arguments de Caterpillar se résumaient ainsi :
- procat porte à confusion avec la marque enregistrée CAT et n’est donc pas enregistrable (art. 12(1)d) de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13[1] (ci-après « LMC »)) ;
- Puma n’est pas l’entité ayant droit à l’enregistrement de la marque procat puisque que celle-ci porte à confusion avec les marques CAT, qui étaient utilisées par Caterpillar au Canada avant 2012 (art. 16(3) LMC). Sans s’y attarder, cet argument incluait la marque-mot CAT dont la demande d’enregistrement a été déposée subséquemment à celle de Puma ;
- procat n’est pas un terme distinctif (art. 2 LMC).
Le 29 août 2017, la Commission des oppositions des marques de commerce (ci-après « COMC ») a rejeté l’opposition de Caterpillar et a autorisé la demande d’enregistrement de procat par Puma. Insatisfaite, Caterpillar a donc porté la décision de la COMC en appel devant la Cour fédérale.
Décision
Les questions auxquelles la Cour fédérale devait répondre peuvent se résumer ainsi :
- La marque procat en lien avec certains articles vestimentaires risque-t-elle de porter à confusion avec les marques CAT pour des produits similaires ?
- Puma a-t-elle droit à l’enregistrement de la marque procat au Canada ?
- La marque procat est-elle distinctive ?
Après avoir statué sur quelques questions préliminaires, auxquelles nous ne nous attarderons pas pour les fins de ce résumé, la Cour fédérale aborde la question de la confusion. Rappelant qu’en vertu de l’article 12(1)d) de la LMC le principe est qu’une marque est enregistrable si elle ne porte pas à confusion avec une marque enregistrée, elle procède ensuite à l’analyse des critères permettant de conclure s’il y a confusion ou non en l’espèce.
La Cour rappelle que les éléments d’appréciation cités à l’alinéa 6(5) de la LMC ne sont pas exhaustifs et n’auront pas tous le même poids dans une situation donnée. Cependant, le degré de ressemblance est souvent celui ayant le plus grand impact.
- Caractère distinctif inhérent de la marque
La Cour confirme la décision de la COMC à l’effet que la marque CAT a un degré élevé de distinctivité inhérente considérant que le mot « cat » n’a aucun lien avec des articles vestimentaires.
Dans son analyse du caractère distinctif inhérent de la marque « procat », la Cour analyse séparément le préfixe et le suffixe. Quant au préfixe « pro », elle conclut qu’il a une signification en lien avec les produits concernés, ce qui déplace le focus de l’analyse sur le suffixe « cat ».
Prenant en compte l’utilisation de chacune des marques au Canada, et notamment leur commercialisation, la Cour conclut que le critère de caractère distinctif inhérent joue en faveur de Caterpillar.
- Période d’usage des marques
La marque CAT étant en usage depuis plus longtemps que la marque procat, cet élément joue en faveur de Caterpillar.
- Genre de produits et nature du commerce
Ces éléments jouent également en faveur de Caterpillar puisque les produits visés par les marques CAT et procat, et les canaux de distribution de ces produits se recoupent.
- Degré de ressemblance
La Cour conclut, contrairement à la COMC, que les deux marques possèdent une ressemblance significative:
« [78] As I found in connection with the inherent distinctiveness analysis, there is evidence that the prefix “pro” has a suggestive or laudatory connotation in association with Puma’s goods, thus shifting the focus of the resemblance assessment to the more striking feature of the trademark, namely, the suffix “cat.” For several reasons, I further find the TMOB committed, at the very least, a palpable and overriding error when it held that while Caterpillar’s mark suggests the idea of a feline animal, Puma’s mark is a coined word without any apparent meaning.
[…]
[81] Based on the foregoing, in my view it is not a “leap” to find the trademark procat, like CAT & Triangle Design, suggests the idea of a feline animal. »
La Cour conclut également que l’élément le plus dominant des deux marques est le mot « cat ».
La Cour examine également la famille de marques de Puma et l’état des enregistrements.
Constatant que les éléments analysés soit sont en faveur de Caterpillar, soit ne sont pas en faveur de Puma, la Cour en vient à la conclusion que le risque de confusion entre les marques CAT et procat est établi selon la prépondérance des probabilités.
En conclusion, la Cour statue que la marque “procat” par Puma en lien avec les produits concernés n’est pas enregistrable.
Le texte intégral de la décision est disponible ici.
[1] À noter que les références aux articles de la LMC réfèrent à ceux en vigueur au moment du dépôt de la demande, soit le 5 janvier 2012.
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