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Intelligence juridique
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21 Fév 2025

Corporation Tricho-Med c. Leprohon inc., 2025 QCCA 114

Par SOQUIJ, Intelligence juridique

PROCÉDURE CIVILE : Un jugement ordonnant le délaissement d’un immeuble et sa vente sous contrôle de justice dans le cadre de l’exercice d’un recours hypothécaire est susceptible d’appel de plein droit, sauf si la valeur de la créance réclamée est inférieure à 60 000 $; il n’est pas question d’un jugement «rendu en matière d’exécution» au sens de l’article 30 paragraphe 8 C.P.C., de sorte qu’une permission d’appel n’est pas nécessaire.

2025EXP-428*** 

Intitulé : Corporation Tricho-Med c. Leprohon inc., 2025 QCCA 114

Juridiction : Cour d’appel (C.A.), Montréal

Décision de : Juges Manon Savard (juge en chef), Suzanne Gagné et Myriam Lachance

Date : 31 janvier 2025

Références : SOQUIJ AZ-52093993, 2025EXP-428 (10 pages)

Résumé

PROCÉDURE CIVILE — appel — droit d’appel — contrat d’entreprise — recours hypothécaire — hypothèque légale — personne ayant participé à la construction — délaissement forcé — immeuble — vente sous contrôle de justice — action personnelle — cumul de recours — cause d’action unique — interprétation de «jugements rendus en matière d’exécution» (art. 30 paragr. 8 C.P.C.) — interprétation large — valeur de l’objet du litige — appel de plein droit — absence de chance raisonnable de succès — questions de fait — absence d’erreur manifeste et déterminante.

INTERPRÉTATION DES LOIS — intention du législateur — interprétation large — interprétation de «jugements rendus en matière d’exécution» (art. 30 paragr. 8 C.P.C.).

Demande pour permission d’interjeter appel de bene esse d’un jugement de la Cour supérieure. Requête de bene esse pour autoriser l’exécution d’une conclusion du jugement. Demande en suspension d’exécution provisoire. Rejetées. Requêtes en rejet d’appel. Accueillies.

Dans le contexte d’un litige concernant des travaux de construction d’une serre de cannabis, le juge de première instance a conclu que la mise en cause, soit l’entrepreneure générale, était endettée envers l’intimée, la sous-traitante, et que l’hypothèque légale de cette dernière était bonne et valable. Le juge a condamné la requérante, c’est-à-dire la cliente, à payer à la mise en cause une somme d’argent. Il a aussi ordonné la vente sous contrôle de justice de l’immeuble en cause, selon des modalités précises, et l’expulsion de la requérante.

Décision
Selon l’article 30 paragraphe 8 du Code de procédure civile, les «jugements rendus en matière d’exécution» ne peuvent faire l’objet d’un appel que sur permission. Au moyen de cette disposition, le législateur renvoie essentiellement aux situations prévues au livre VIII (art. 656 à 836) du Code de procédure civile relativement à l’exécution des jugements, soit aux étapes postérieures à un litige déjà tranché. Or, il est bien établi que la notion de «jugements rendus en matière d’exécution» doit être interprétée largement, et ce, de façon à remédier aux abus et aux effets dilatoires qu’un appel de plein droit, mais qui n’est pas sérieux, pourrait engendrer. Par ailleurs, cette interprétation ne doit pas être indûment large au point de dénaturer l’intention du législateur.

En l’espèce, si l’on se penche sur sa substance véritable, le jugement de première instance n’est pas un jugement rendu en matière d’exécution. D’abord, un jugement qui prévoit une ordonnance de délaissement n’est pas, de ce seul fait, un jugement rendu en matière d’exécution. Certes, le livre VIII (art. 656 à 836) du Code de procédure civile comporte des dispositions relatives au délaissement. Une telle conclusion occulterait cependant la nature et la portée que peut avoir un recours hypothécaire ainsi que la substance véritable du jugement entrepris.

En effet, la mise en cause a exercé un recours hypothécaire afin de recouvrer sa créance et y a joint une action personnelle contre la requérante. Si la mise en cause n’avait exercé qu’une action personnelle, l’appel du jugement serait de plein droit en raison de la valeur de l’objet en litige. Le cumul du recours hypothécaire ne change pas la substance véritable de l’action et ne fait pas non plus en sorte qu’une permission d’appeler est requise. Dans les circonstances, il n’y a que 1 seule cause d’action.

Enfin, le fait que le jugement ait ordonné la vente sous contrôle de justice à des conditions précises n’en fait pas un jugement rendu en matière d’exécution. Ce recours hypothécaire ne doit pas être confondu avec la vente sous contrôle de justice faite par l’huissier, laquelle permet l’exécution forcée d’un jugement portant sur les biens du patrimoine du débiteur.

La permission d’appel n’est donc pas requise en l’espèce, car la valeur de la créance réclamée est inférieure au seuil de 60 000 $. Toutefois, l’appel ne présente aucune chance raisonnable de succès, car la requérante soulève de pures questions de fait qui relèvent de l’appréciation du juge. En outre, elle ne cible aucune erreur manifeste et déterminante susceptible de justifier l’intervention de la Cour.

Instance précédente : Juge Andres C. Garin, C.S., Montréal, 500-17-108810-196, 2024-10-11, 2024 QCCS 4008, SOQUIJ AZ-52068174.

Réf. ant : (C.S., 2024-10-11), 2024 QCCS 4008, SOQUIJ AZ-52068174, 2024EXP-2737; (C.A., 2024-12-20), 2024 QCCA 1734, SOQUIJ AZ-52086861.

Le texte intégral de la décision est disponible ici

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