12 Fév 2016

ASSURANCE : La police d’assurance, lue dans son ensemble, permettait au juge de première instance de conclure que, en cas de fraude perpétrée par un même employé pendant plusieurs années, l’assuré ne pouvait réclamer plus que la limite de responsabilité prévue par événement, soit 100 000 $.

 2016EXP-462 
Intitulé : Comité paritaire de l’industrie des services automobiles de la région de Montréal (CPA Montréal) c. Société d’assurances générales Northbridge (Lombard General Insurance Company of Canada), 2015 QCCA 2039
Juridiction : Cour d’appel (C.A.), Montréal, 500-09-024444-143 et 500-09-024450-140
Décision de : Juges Jacques Chamberland, Geneviève Marcotte et Jean-François Émond
Date : 7 décembre 2015
Références : SOQUIJ AZ-51237076, 2016EXP-462, J.E. 2016-220 (21 pages)

 

Résumé 
 
ASSURANCE — assurance de biens — vol — fraude par un même employé pendant plusieurs périodes d’assurance — couverture contre la malhonnêteté d’un employé — clause d’exclusion — interprétation de «dans le cours normal de son travail» — événement unique — étendue de la couverture — limite de la couverture d’assurance — droit à l’indemnité.
Appels d’un jugement de la Cour supérieure ayant condamné l’assureur à payer 100 000 $ à son assuré. Rejetés.
Lemay a agi à titre de directeur des services financiers et des ressources matérielles auprès de l’assuré, le Comité paritaire de l’industrie des services automobiles de la région de Montréal (CPA Montréal), de décembre 1988 jusqu’à son congédiement, en juin 2009. Ses principales tâches et responsabilités comprenaient la création, la modification, la gestion et la tenue du service de paie des employés du demandeur. En plus de son propre compte de paie ordinaire portant le no 500, il a donné instruction au centre de services de paie de créer trois autres comptes, portant les numéros 501, 502 et 510, afin de pouvoir percevoir des sommes additionnelles à titre de vacances. Celles-ci lui étaient versées au moyen de chèques libellés à son nom, et ce, sans qu’aucune retenue fiscale soit prélevée. Ainsi, grâce à une série de manipulations comptables, les sommes détournées par Lemay n’ont jamais été découvertes par le demandeur avant le dépôt du rapport d’enquête de juricomptabilité daté du 1er septembre 2009. À la suite d’un jugement rendu par défaut à l’encontre de Lemay pour la somme de 1 940 819 $, l’assuré a récupéré 80 776 $, laissant ainsi une perte nette de 1 860 043 $. En première instance, il a réclamé à son assureur, la Société d’assurances générales Northbridge, la totalité de la perte subie, évaluée à 1 035 000 $. Le juge a conclu que les actes malhonnêtes de l’employé étaient couverts par la police d’assurance mais que, à titre d’actes reliés, ils constituaient un seul et même événement, même s’ils se sont étalés sur 11 périodes d’assurance distinctes, assujetti à une même limite de garantie de 100 000 $. L’assureur soutient que le juge a erré en concluant que les sommes frauduleusement perçues par l’employé Lemay étaient couvertes par la police d’assurance. Pour sa part, l’assuré prétend que le juge a commis une erreur en concluant que l’indemnité à laquelle il avait droit était limitée à 100 000 $.
 
Décision

Mme la juge Marcotte: Même si le juge a d’abord déterminé que les mots «dans le cours de son travail» s’appliquaient autant aux salaires qu’aux autres avantages énumérés à l’article A.1. de la police, lequel est intitulé «Malhonnêteté d’un employé», il a conclu que le stratagème frauduleux mis en place par l’employé Lemay ne tombait sous le couvert ni des salaires ni de quelque autre avantage obtenu dans le cours normal de son travail. Le fait que les sommes volées ont été désignées sous le vocable «vacances» ne signifie pas qu’il s’agissait réellement d’indemnités de congé annuel. En l’espèce, l’employé fraudeur, responsable du service de la paie, a choisi de les qualifier ainsi puisque c’était le moyen le plus commode dont il disposait pour s’approprier ces sommes sans attirer l’attention de l’employeur. D’ailleurs, il n’a jamais prétendu avoir droit à des paies de vacances en sus de celles versées sous son vrai numéro d’employé. D’autre part, la situation n’est pas celle que cherche à exclure la police, à savoir le risque pour l’assureur de se voir mêlé aux relations employeur-employé de son assuré sur des questions d’exigibilité de salaires, de commissions ou d’autres bénéfices. Dans ces circonstances, le juge n’a pas commis d’erreur en concluant que la simple qualification donnée par l’employé malhonnête aux versements qu’il organisait ne suffisait pas à en faire un salaire au sens de l’exclusion. Par ailleurs, la police d’assurance, lue dans son ensemble, permettait au juge de conclure que, en cas de fraude perpétrée par un même employé pendant plusieurs années, l’assuré ne pouvait réclamer plus que la limite de responsabilité prévue par événement, soit 100 000 $.
 

Instance précédente : Juge Michel A. Pinsonnault, C.S., Montréal, 500-17-065517-115, 2014-04-22, 2014 QCCS 1747, SOQUIJ AZ-51068650.

Réf. ant : (C.S., 2014-04-22), 2014 QCCS 1747, SOQUIJ AZ-51068650, 2014EXP-2493, J.E. 2014-1426.
Le texte intégral de la décision est disponible ici.

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