24 Juil 2017

L’enrichissement injustifié entre conjoints de fait

Par Sophie Claude
Joli-Cœur Lacasse S.E.N.C.R.L.




Le
Code civil du Québec prévoit que les époux contribuent aux charges du mariage à
proportion de leurs facultés respectives et que chaque époux peut s’acquitter
de sa contribution par son activité au foyer. Toutefois, la contribution aux
charges de la résidence n’est pas aussi claire entre conjoints de fait.

La décision Droit de la famille — 171202 nous éclaire sur la situation et plus
particulièrement au sujet du concept d’enrichissement injustifié entre
conjoints de fait

En 2004, les parties s’entendent pour
que Madame retourne aux études et que Monsieur continue d’être le seul support
financier de la famille. Suite à la naissance de leur deuxième enfant, les
problèmes s’installent entre le couple de sorte que le 13 avril 2014, les
parties cessent définitivement de faire vie commune.

Monsieur plaide avoir droit à un
dédommagement à titre d’enrichissement injustifié puisque, d’une part, Madame
n’a pas contribué financièrement aux charges du ménage dans la proportion de
ses moyens à partir du moment où elle obtient son diplôme en 2012 et, d’autre
part, depuis la fin de la vie commune, Madame ne paie pas la moitié des
dépenses reliées à la résidence détenue en copropriété. Le Tribunal doit donc
déterminer s’il y a eu enrichissement sans cause par Madame et, le cas échéant,
la compensation monétaire due à Monsieur.

Le Code
civil du Québec
prévoit aux articles 1493 et suivants le principe
d’enrichissement injustifié. La détermination de l’existence ou non de
l’enrichissement injustifié doit se faire au moment où les procédures sont
intentées.

En 2012, Madame
travaille pour une très courte période puisqu’elle tombe enceinte. Suite à la
naissance du premier enfant du couple, elle tombe de nouveau enceinte en 2013.
Suite à la naissance des deux enfants, Madame s’occupe principalement des enfants
et des tâches ménagères.  Elle ne retourne sur le marché du travail qu’en
avril 2014. Ainsi,
même si l’apport de Madame n’est pas financier, il est indéniable
qu’elle contribue autrement aux charges du ménage. Le Tribunal établit donc qu’il
ne peut être question ni d’enrichissement ni d’appauvrissement par l’une ou
l’autre des parties.

Quant au partage des charges communes de
la résidence après la séparation, l’honorable Chantal Lamarche explique :

«[58]       
Cependant, à compter du moment où la vie commune cesse, il n’y a plus de
projet commun ou d’entente convenue sur le partage des dépenses reliées à la
résidence. Ce sont plutôt les règles énoncées au Code civil du Québec qui
s’appliquent voulant que les dépenses doivent être partagées dans la même proportion
que la part de chacun
».

Ainsi, la part de
chacun est présumée égale et en l’absence d’une preuve susceptible de renverser
cette présomption, chaque partie est donc responsable de la moitié des frais
reliés à la résidence. En l’espèce, les parties devaient contribuer de façon
égale aux charges, et ce depuis la date de la fin de la vie commune, soit le 14
avril 2013. Ainsi, le Tribunal condamne Madame à payer la somme de
22 292,00$ à Monsieur à titre d’enrichissement injustifié.

En conclusion, le Tribunal
nous rappelle également que la théorie de l’enrichissement sans cause doit être
appliquée avec beaucoup de souplesse en matière familiale de façon à ne pas
être utilisée pour combler les vides juridiques, et ce particulièrement pour
les conjoints de fait.

La décision se trouve ici

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