Résiliation du bail et proposition concordataire
Par Pierre-Luc Beauchesne, Gowling Lafleur Henderson S.E.N.C.R.L.
Par Pierre-Luc Beauchesne
Gowling Lafleur Henderson s.e.n.c.r.l., s.r.l.
Dans Pierre Belvédère Inc. (Proposition de) (2013 QCCS 3052), la Cour supérieure avait rejeté, le 8 juillet 2013, la requête du locateur de la débitrice qui s’opposait à la résiliation du bail commercial suite au préavis transmis en vertu de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité. En effet, le Tribunal avait conclu que la résiliation du bail en question était nécessaire afin d’assurer la viabilité de la proposition. Dans Pierre Belvédère Inc. (Proposition de) (2013 QCCA 2002), la Cour d’appel a rejeté l’appel du locateur qui prétendait que le juge de première instance n’avait pas appliqué le bon test pour déterminer si, selon le paragraphe 65.2 (3) de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité, la débitrice ne pouvait faire de proposition viable à ses créanciers sans la résiliation de son bail commercial.
Pour un rappel des faits, nous vous invitons à relire notre billet du 23 juillet 2013.
La Cour d’appel conclut que le juge de première instance n’a pas commis d’erreur en concluant que la débitrice s’était déchargée de son fardeau de prouver que sans la résiliation du bail, sa proposition ne serait pas viable :
« [5] L’appelante a tort de reprocher au juge d’avoir considéré l’ensemble de la situation de l’intimée et de s’être ainsi écarté du test à appliquer. Selon elle, le juge devait s’en tenir à la seule conséquence financière de la résiliation du bail de son siège social pour évaluer la viabilité de la proposition. Rien dans le texte de l’article 65.2 LFI ne permet de soutenir cette proposition. Au surplus, l’appelante n’a pas produit la pièce D-8 qui illustre les prévisions budgétaires de l’intimée pour l’année 2013, calculées en fonction de la résiliation des baux. Cette omission empêche l’évaluation de la justesse de son argument.
[6] La conclusion du juge de première instance selon laquelle l’intimée s’est déchargée de son fardeau de prouver que, sans la résiliation du bail qui la lie à l’intimée jusqu’en 2016, la proposition qu’elle avance ne serait pas viable, trouve un solide appui dans la preuve administrée devant lui et, notamment, sur les éléments suivants :
• la proposition avancée par l’intimée comprend un plan de redressement qui énonce la fermeture du siège social actuel et la résiliation du bail qui la lie à l’appelante ainsi que sa relocalisation dans un local plus petit et moins dispendieux;
• le nombre d’employés dans le siège social a été réduit de 54 à 33 et une nouvelle réduction est envisagée;
• le plan de redressement a été soumis à la Banque Royale, prêteur garanti de premier rang, et à ses experts comptables;
• selon le témoignage du président et principal actionnaire de l’intimée, la résiliation du bail et la relocalisation de l’entreprise réduira le coût de location de 224 000 $ par année;
• la Banque Royale consent à prolonger le financement temporaire de l’intimée à la condition expresse qu’elle respecte le plan de redressement;
• s’il est vrai que l’intimée a besoin de financement additionnel pour combler un déficit temporaire de liquidités, un autre financier, sans s’engager formellement, se dit prêt à consentir une garantie de marge de crédit à condition que le plan de redressement soit réalisé dans sa totalité;
• si le bail n’est pas résilié, les créanciers de l’entreprise refusent d’accorder le financement nécessaire, la proposition devient non viable et plus rien ne peut éviter la faillite de l’intimée;
• en l’absence d’une autre solution de rechange si l’entreprise cesse ses opérations, une centaine d’employés perdent leur emploi et les fournisseurs perdent tout. »
Le texte intégral de la décision de première instance est disponible ici.
Le texte intégral de la décision de la Cour d’appel est disponible ici.
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