Pénal : La conduite du juge de première instance a suscité une crainte raisonnable de partialité; l’appelant, déclaré coupable de meurtre au premier degré, aura droit à un nouveau procès.
Par SOQUIJ, Intelligence juridique
2014EXP-2523
Intitulé : Hébert c. R., 2014 QCCA 1441
Juridiction : Cour d’appel (C.A.), Montréal, 500-10-005066-111
Décision de : Juges Nicole Duval Hesler, France Thibault et Manon Savard
Date : 1er août 2014
Références : SOQUIJ AZ-51097361, 2014EXP-2523, J.E. 2014-1445 (20 pages)
Résumé
PÉNAL (DROIT) — garanties fondamentales du processus pénal — audition publique et impartiale par un tribunal indépendant — meurtre au premier degré — crainte raisonnable de partialité — équité du procès — erreur judiciaire — conduite du juge du procès — interventions — propos inappropriés — avocat de l’accusé — tenue d’un nouveau procès.
DROITS ET LIBERTÉS — droits judiciaires — audition publique et impartiale par un tribunal indépendant — juge du procès — procès devant jury — meurtre au premier degré — crainte raisonnable de partialité — équité du procès — erreur judiciaire — conduite du juge du procès — interventions — propos inappropriés — avocat de l’accusé — tenue d’un nouveau procès.
Appel d’un verdict de culpabilité. Accueilli; la tenue d’un nouveau procès est ordonnée.
L’appelant a été déclaré coupable de meurtre au premier degré. Il invoque une crainte raisonnable de partialité du juge ayant présidé le procès en raison de la conduite que ce dernier a adoptée à l’endroit de son avocate. Selon lui, cette conduite aurait également compromis l’équité du procès.
Décision
Mme la juge en chef Duval Hesler : En présence du jury comme en son absence, le juge du procès a été intransigeant à l’endroit de la procureure de l’appelant. Pas une seule fois, dans ses échanges avec elle, il n’a utilisé son titre professionnel, préférant l’appeler «madame» avec une condescendance manifeste. Aux propos cinglants du juge envers la procureure de l’appelant s’ajoute l’attitude intrinsèquement sexiste qui transpirait de ses propos. Le refus d’entendre une objection fondée sur le droit à la divulgation de la preuve de même qu’une requête sur les conditions de détention de l’appelant, des demandes raisonnables, sensées et peut-être justifiées, ne peut que susciter des doutes quant à l’ouverture d’esprit et à l’impartialité du juge du procès. Cette crainte raisonnable de partialité suffirait pour accueillir l’appel. Toutefois, il faut aussi prendre en considération le fait que la conduite du juge constituait une atteinte directe à l’équité du procès. À l’instar de la crainte raisonnable de partialité, il importe non seulement que le procès soit équitable, mais aussi qu’il paraisse l’être. Lorsqu’il s’agit de l’équité du procès, la solidité de la preuve présentée contre un accusé est sans pertinence. Aux termes de l’article 686 (2) du Code criminel, la Cour doit ordonner un nouveau procès, indépendamment du poids de la preuve de la poursuite. Les propos désobligeants d’un juge conduisent à une erreur judiciaire dès qu’une personne raisonnable peut conclure qu’un accusé n’a pas subi un procès équitable. En l’espèce, le juge a tenu devant le jury des propos discréditant l’avocate et la défense qu’elle tentait de présenter. Agressif et méprisant, le juge a remis en question son professionnalisme et sa compétence, ce que le jury a dû remarquer. Une telle animosité et un tel mépris de la part du juge ont compromis l’équité du procès. Dans les circonstances, la tenue d’un nouveau procès s’impose.
Instance précédente : Juge Jean-Guy Boilard, C.S., Beauharnois (Salaberry-de-Valleyfield), 760-01-051646-104, 2011-12-01.
Le texte intégral de la décision est disponible ici
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