par
Jasmine Jolin
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13 Juin 2016

CONSOMMATION: Un contrat de vacances à temps partagé peut être résilié

Par Jasmine Jolin


Par Jasmine Jolin
Paquette Gadler inc.
 
Dans l’affaire Lavoie c. Tenedora 87 SRL (Phoenix Spa and Resort), 2016 QCCQ 2726, la Cour du Québec qualifie le contrat de vacances à temps partagé de contrat de prestation de services, permettant ainsi aux consommateurs de le résilier unilatéralement.

 

Contexte
 
Les demandeurs requièrent l’annulation du contrat intervenu entre eux et Tenedora 87 SRL (Phoenix Spa) (la « défenderesse »), invoquant que de fausses représentations leur ont été faites lors de la conclusion du contrat.
 
Suite à la participation des demandeurs à un tirage au Salon de la Mariée au début de l’année 2015, ceux-ci sont invités à une séance d’information chez la défenderesse à titre de gagnants. Le 24 janvier 2015, une présentation de quatre (4) heures est réalisée, au terme de laquelle les demandeurs signent un contrat d’acquisition de 20 000 « points de vacances ». À l’aide de ces derniers, les demandeurs peuvent réserver des unités aux résidences de villégiature partenaires de Resort Condominium International (« RCI »). Par la même occasion, les demandeurs payent la totalité du prix demandé, soit 3 673,45 $.
 
Tentant de réserver un forfait auprès de la défenderesse et de RCI, les demandeurs se rendent compte que le coût de leur voyage est beaucoup plus élevé que ce qui leur avait été présenté par la défenderesse  Le 3 mars 2015, ils envoient à la défenderesse un avis d’annulation de la convention.
 
De son côté, la défenderesse allègue l’absence de fausses représentations.  Elle invoque que le tout est conforme au contenu du contrat. De plus, la défenderesse se porte demanderesse reconventionnelle et réclame aux demandeurs des frais d’entretien payables en vertu du contrat de 1 006,00 $.
 
Décision et analyse
 
L’Honorable juge Claude Laporte note de façon préliminaire l’incompréhensibilité de la convention conclue entre les parties. Il soulève notamment le fait que le contrat est composé de quatre documents distincts et qu’il ne contient aucune description de ce qu’est le système de points RCI ni même de ce qu’est RCI. Le Tribunal résume la situation de la façon suivante : 

« [21] Comment se retrouver dans un tel charabia? Quelles sont les obligations assumées par la défenderesse? En a-t-elle véritablement assumées? ».

Soulevant la question quant à savoir si le contrat respecte les dispositions de la Loi sur la protection du consommateur, RLRQ, c. P. 40.1, le Tribunal met cependant cette question de côté pour se tourner vers la qualification de ce type de contrat. Il conclut qu’un tel contrat doit être interprété comme en étant un de prestation de services :

« [28] À l’évidence, il ne s’agit pas d’un contrat d’emploi, ni d’un mandat. Il n’y a pas non plus réalisation d’un ouvrage.  Ce n’est pas un bail non plus.  Il y a bien un aspect « vente », mais ceci est insuffisant pour qualifier le contrat comme étant un « contrat de vente » : en effet, les demandeurs ont bel et bien acheté des « points« , mais ces « points » ne sont pas des biens, ils permettent uniquement d’acquérir des services.  Ils constituent une forme de crédit pour des services futur (services hôteliers, services de transport,  de location de voiture, activités récréatives, etc.).

[29]        De l’ensemble de la preuve, y compris le contrat lui-même, on comprend que Phoenix Spa, avec son « affiliée » RCI, offre des services – ce que, du reste, précise bien le préambule.

[30]        Par ailleurs il existe plusieurs similitudes entre le genre de prestations que semble offrir Phoenix Spa (et RCI) dans ce contrat et celles qu’offre un agent de voyages.  En effet, les deux agissent comme intermédiaires et offrent des services touristiques variés.  L’article 2 de la Loi sur les agents de voyages est fort révélateur à cet égard.

[31]        Un tel contrat a été qualifié de contrat de prestation de service. » [Références omises]

Ainsi assujetti aux règles du Code civil du Québec (« C.c.Q. ») sur le contrat de prestation de services, le contrat peut être résilié unilatéralement par le client (art. 2125 C.c.Q. – une disposition qui est d’ailleurs d’ordre public). En l’espèce, puisqu’aucun point-vacances n’a été utilisé par les demandeurs, le Tribunal conclut que la totalité du prix payé par les demandeurs doit être remboursée. La demande reconventionnelle est, quant à elle, rejetée.
 
Commentaires
 

De par ce jugement, une certaine protection légale est finalement accordée aux consommateurs concluant ce type de convention communément appelée « contrat de vacances à temps partagé ». Alors que les tribunaux ont maintes fois répété qu’un tel contrat ne peut être résilié en raison d’une vente sous pression, le Tribunal donne ici une indication claire quant aux règles s’appliquant dans un cas comme celui invoqué en l’espèce. Il sera intéressant de suivre la jurisprudence ultérieure sur cette question.

Le texte intégral de la décision est disponible ici.

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