par
SOQUIJ
Intelligence juridique
Articles du même auteur
12 Jan 2024

ArcelorMittal Canada inc. c. R., 2023 QCCA 1564

Par SOQUIJ, Intelligence juridique

ÉNERGIE, MINES ET RESSOURCES : La juge de première instance n’a pas erré en estimant que les résultats d’analyse des effluents aux points de rejet de la mine exploitée par les appelantes, auxquelles il était reproché d’avoir rejeté des substances nocives dans les eaux fréquentées par les poissons, étaient recevables en preuve ni en concluant qu’ils constituaient une preuve de leur culpabilité.

2024EXP-54*** 

Intitulé : ArcelorMittal Canada inc. c. R., 2023 QCCA 1564

Juridiction : Cour d’appel (C.A.), Montréal

Décision de : Juges Yves-Marie Morissette, Sophie Lavallée et Lori Renée Weitzman

Date : 14 décembre 2023

Références : SOQUIJ AZ-51990385, 2024EXP-54 (24 pages)

Résumé

ÉNERGIE, MINES ET RESSOURCES — exploitation d’une mine — pêche — infraction pénale — Loi sur les pêches — Règlement sur les effluents des mines de métaux — avoir rejeté ou permis le rejet de substances nocives dans des eaux où vivent des poissons — fiabilité des résultats de concentration en matières en suspension — force probante — marge d’erreur — régime d’autodéclaration — défense de diligence raisonnable — responsabilité stricte — avoir omis d’effectuer certains tests imposés par le règlement lors de rejets irréguliers — interprétation de «rejet irrégulier» (art. 14 (1) b) et 17 (1) du règlement) — exclusion de la preuve — droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives — renonciation — consentement — document remis à la suite d’une demande d’information — société en nom collectif — associés — responsabilité pénale — appel.

PÉNAL (DROIT) — infraction — autres infractions pénales — Loi sur les pêches — Règlement sur les effluents des mines de métaux — avoir rejeté ou permis le rejet de substances nocives dans des eaux où vivent des poissons — exploitation d’une mine — fiabilité des résultats de concentration de matières en suspension — force probante — marge d’erreur — régime d’autodéclaration — défense de diligence raisonnable — responsabilité stricte — avoir omis d’effectuer certains tests imposés par le règlement lors de rejets irréguliers — interprétation de «rejet irrégulier» (art. 14 (1) b) et 17 (1) du règlement) — exclusion de la preuve — droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives — renonciation — consentement — document remis à la suite d’une demande d’information — société en nom collectif — associés — responsabilité pénale — appel.

INTERPRÉTATION DES LOIS — interprétation téléologique — intention du législateur — interprétation contextuelle — interprétation de «rejet irrégulier» (art. 14 (1) b) et 17 (1) du Règlement sur les effluents des mines de métaux) — infraction pénale — avoir omis d’effectuer certains tests imposés par le règlement lors de rejets irréguliers.

PÉNAL (DROIT) — preuve pénale — exclusion de la preuve — rejet — droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives — renonciation — consentement — document remis à la suite d’une demande d’information — infraction pénale — Loi sur les pêches — appel.

PÉNAL (DROIT) — garanties fondamentales du processus pénal — droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives — exclusion de la preuve — rejet — renonciation — consentement — document remis à la suite d’une demande d’information — infraction pénale — Loi sur les pêches — appel.

DROITS ET LIBERTÉS — droits judiciaires — protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives — exclusion de la preuve — rejet — renonciation — consentement — document remis à la suite d’une demande d’information — infraction pénale — Loi sur les pêches — appel.

CONTRATS SPÉCIAUX — société — société en nom collectif — associés — application de l’article 2215 alinéa 1 C.C.Q. — absence de stipulation sur le mode de gestion — infraction pénale — Loi sur les pêches — avoir rejeté ou permis le rejet de substances nocives dans des eaux où vivent des poisons — avoir omis d’effectuer certains tests imposés par le Règlement sur les effluents des mines de métaux lors de rejets irréguliers — responsabilité pénale — appel.

Requête en autorisation d’appel portant sur des questions mixtes de fait et de droit. Accueillie. Appel d’une déclaration de culpabilité sous des chefs d’accusation en vertu de la Loi sur les pêches et du Règlement sur les effluents des mines de métaux ainsi que d’un jugement ayant accueilli en partie une requête en exclusion de la preuve. Rejeté.

Les appelantes, qui exploitent une mine de fer, ont été déclarées coupables sous plusieurs chefs d’accusation en vertu de la Loi sur les pêches, notamment pour avoir rejeté, dans des eaux où vivent des poissons, des substances nocives dépassant la concentration maximale permise de matières en suspension et pour avoir omis d’effectuer certains tests obligatoires.

Décision
Mme la juge Lavallée: La juge de première instance n’a pas erronément appliqué une présomption de fiabilité à l’égard des résultats d’analyse des effluents aux 2 points de rejet finaux de la mine. Elle a simplement affirmé, à juste titre, que ces résultats étaient recevables en preuve. Les appelantes font fi des conclusions de l’arrêt R. c. Fitzpatrick (C.S. Can., 1995-11-16), SOQUIJ AZ-95111113, J.E. 95-2135, [1995] 4 R.C.S. 154, qui a reconnu la validité du régime d’autodéclaration de la Loi sur les pêches. La juge n’a pas non plus erré lorsqu’elle s’est penchée sur la force probante des résultats et qu’elle a conclu qu’ils constituaient une preuve hors de tout doute raisonnable de la culpabilité des appelantes.

La juge a également pris en considération les défaillances invoquées par les appelantes concernant toutes les étapes du processus, de l’échantillonnage à l’analyse, et elle a estimé que tous les résultats présentés en preuve étaient suffisamment fiables pour être pris en compte afin de déterminer s’il y avait ou non un dépassement de concentration de matières en suspension. Cette décision était fondée. Par ailleurs, la juge n’a pas erré en décidant qu’il n’y avait pas lieu d’appliquer une marge d’erreur de 15 % aux résultats, l’article 12 (2) et l’annexe 3 du Règlement sur les effluents des mines de métaux ne prévoyant aucunement qu’une telle marge d’erreur devait être appliquée pour valider les résultats.

Quant à la défense de diligence raisonnable, compte tenu de la taille de l’entreprise en l’espèce, du potentiel de risque environnemental et de l’accessibilité à l’expertise requise, le niveau de diligence attendu de la part des appelantes quant aux mesures de prévention mises en place aux points de rejet est accru. La juge n’a pas erré lorsqu’elle a déterminé que ces dernières n’avaient pas fait preuve d’une diligence raisonnable afin de prévenir les rejets d’effluents miniers. Elle a notamment eu raison de conclure que certaines des démarches mises en place n’avaient servi qu’à maîtriser la source des infractions, et non à prévenir leur commission. De telles mesures adoptées après coup ne peuvent donner ouverture à une défense de diligence raisonnable. Les affirmations voulant que les systèmes de gestion des eaux soient complexes et que les dépassements aient eu lieu dans le cadre des activités courantes impliquant le rejet d’un effluent ne sauraient non plus convaincre le tribunal que les appelantes ont fait preuve d’une diligence raisonnable. Sans avoir à atteindre la perfection, les systèmes utilisés à la mine auraient dû être mieux planifiés et mis en place avec beaucoup plus de prévoyance.

La juge a également eu raison de conclure à la responsabilité pénale de 7623704 Canada Inc. Cette dernière était l’associée de l’autre appelante dans la société en nom collectif ArcelorMittal Exploitation minière Canada, et le témoignage du conseiller juridique des appelantes n’était pas suffisant, en l’absence d’une entente écrite, pour repousser la présomption prévue à l’article 2215 alinéa 1 du Code civil du Québec quant à la gestion de la mine.

En ce qui concerne la conclusion selon laquelle tout rejet instantané dont la concentration de matières en suspension dépasse 30 mg/L est un «rejet irrégulier» au sens du règlement, il n’y a pas lieu de retenir l’interprétation des appelantes selon laquelle elles ne sauraient être tenues pénalement responsables d’avoir omis d’effectuer des tests ou des suivis quant à des rejets irréguliers. En effet, cette interprétation erronée revient à dire que seuls les rejets provenant de circonstances inusitées, comme le bris d’une digue, sont soumis à un test visant à protéger les poissons et leur habitat dans le cas où un échantillon contient déjà des substances nocives pour eux. La juge n’a commis aucune erreur dans l’interprétation législative et réglementaire des dispositions applicables.

Enfin, le moyen d’appel concernant le rejet partiel de la requête en exclusion de la preuve découlant de la saisie est également rejeté, les appelantes ayant valablement renoncé à la protection qu’offre l’article 8 de la Charte canadienne des droits et libertés lorsqu’elles ont remis en toute connaissance de cause les documents en question à Environnement Canada à la suite d’une demande d’information.

Instance précédente : Juge Julie Riendeau, C.Q., Chambre criminelle et pénale, Montréal, 500-73-004529-174 et 500-73-004530-172, 2021-10-15, 2021 QCCQ 10578, SOQUIJ AZ-51803907.

Réf. ant : (C.Q., 2020-01-31), 2020 QCCQ 698, SOQUIJ AZ-51672434, 2020EXP-640; (C.Q., 2021-10-15), 2021 QCCQ 10578, SOQUIJ AZ-51803907, 2021EXP-2876; (C.A., 2021-12-17), 2021 QCCA 1928, SOQUIJ AZ-51818215, 2022EXP-194; (C.A., 2023-08-01), 2023 QCCA 995, SOQUIJ AZ-51957873, 2023EXP-1948.

Le texte intégral de la décision est disponible ici.

Commentaires (0)

L’équipe du Blogue vous encourage à partager avec nous et nos lecteurs vos commentaires et impressions afin d’alimenter les discussions sur le Blogue. Par ailleurs, prenez note du fait qu’aucun commentaire ne sera publié avant d’avoir été approuvé par un modérateur et que l’équipe du Blogue se réserve l’entière discrétion de ne pas publier tout commentaire jugé inapproprié.

Laisser un commentaire

À lire aussi...