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SOQUIJ
Intelligence juridique
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28 Nov 2014

PROCÉDURE CIVILE : Le mémoire de frais, totalisant 15 935 533 $, doit être taxé dans son intégralité, sauf en ce qui a trait aux frais engagés par le représentant de l’une des parties pour assister aux commissions rogatoires, soit une possibilité que n’envisage pas le Code de procédure civile.

Par SOQUIJ, Intelligence juridique

2014EXP-3688
Intitulé : Widdrington (Succession de) c. Wightman, 2014 QCCS 5059
Juridiction : Cour supérieure (C.S.), Montréal, 500-05-001686-946
Décision de : Juge Martin Castonguay
Date : 27 octobre 2014
Références : SOQUIJ AZ-51117929, 2014EXP-3688, J.E. 2014-2070 (19 pages)

Résumé
PROCÉDURE CIVILE — honoraires judiciaires — mémoire de frais — frais d’expert — double taxation — dossier de faillite — frais de sténographie — interrogatoire — transcription non produite au dossier de la Cour — contrat judiciaire — commission rogatoire — frais de déplacement — frais d’hébergement — frais de commissaire — caractère raisonnable — procureur local — représentant d’une partie.
Taxation contradictoire d’un mémoire de frais.
Le présent dossier a été institué à la suite de la faillite de Castor Holdings Ltd. Au terme du procès, la Cour supérieure a refusé d’exercer son pouvoir discrétionnaire et de réduire les dépens. À la suite d’un débat exhaustif sur le sujet, la Cour d’appel a refusé d’intervenir quant à cette question. La demanderesse a ensuite déposé une mémoire de frais, aux termes duquel elle réclame la somme de 15 935 533 $, que les défendeurs contestent presque intégralement.

Décision
Il est inhabituel qu’un juge de la Cour supérieure procède à la taxation d’un mémoire de frais. Le tribunal détient les compétences d’un greffier. De plus, les parties ont, en l’espèce, convenu de supprimer l’étape de la taxation par le greffier pour en arriver directement à un débat contradictoire devant le tribunal. Si jamais il y avait dédoublement entre les frais taxés et payés par le syndic dans le dossier de faillite et ceux accordés en l’espèce, c’est au syndic qu’il reviendra de réclamer les sommes perçues en double. La solution contraire équivaudrait à permettre aux défendeurs de s’enrichir sans cause en se soustrayant partiellement aux effets du jugement dont il est question ici. Ensuite, le fait que la demanderesse n’ait pas avancé les fonds pour les débours engagés à l’occasion de ce procès n’est d’aucune conséquence. En effet, l’article 479 du Code de procédure civile, qui emporte distraction des frais en faveur des avocats, ne tient pas compte de ce facteur. Le fait que l’un des cabinets ait cédé ses droits aux dépens aux avocats de la demanderesse n’est d’aucune conséquence non plus (Thérien c. Pellerin (C.A., 1998-04-09), SOQUIJ AZ-98011386, J.E. 98-934).

Quant aux frais de sténographie, les défendeurs ne peuvent invoquer le fait qu’ils dépassent le taux applicable, compte tenu du contrat judiciaire conclu à ce sujet et auquel ils ont adhéré. Ils ne peuvent non plus contester le coût d’interrogatoires qui n’ont pas été produits au dossier de la Cour puisque le principe établi par 150460 Canada inc. c. Gazin (C.S., 1999-07-20), SOQUIJ AZ-99021801, J.E. 99-1683, au stade de l’appel doit être étendu aux frais de transcription en première instance. En outre, dans un contexte où la juge du fond a choisi d’inclure tous les coûts («all costs») liés aux divers rapports d’expert, sans faire référence au Tarif des honoraires judiciaires des avocats, et où les défendeurs ont renoncé à contester devant elle tant le quantum des dépenses que la pertinence du travail effectué, il n’appartient pas au tribunal d’intervenir à cet égard. La juge du fond a également choisi d’inclure «tous les coûts» liés aux diverses commissions rogatoires, sans faire référence au tarif. Or, dans un contexte où les défendeurs n’ont présenté aucun comparable permettant au tribunal d’évaluer le caractère raisonnable des frais de déplacement et d’hébergement réclamés, ni des frais de commissaire, il y a lieu de les taxer intégralement, conformément aux termes utilisés par la juge du fond et à l’approche pragmatique adoptée par la Cour d’appel dans Canada (Procureur général) c. Imperial Tobacco Canada Ltd. (C.A., 2009-06-04), 2009 QCCA 1103, SOQUIJ AZ-50559099, J.E. 2009-1083, [2009] R.J.Q. 1272. Il y a cependant lieu de retrancher la somme de 39 236 $, faute d’une disposition du Code de procédure civile envisageant la possibilité de convier à une commission rogatoire le représentant de l’une des parties au litige ou d’autorisation du tribunal expressément à cet effet.

Enfin, puisque le Code de procédure civile prévoit le droit, pour une personne participant à une commission rogatoire, d’être représentée, les frais engagés à cet égard sont sujets à taxation. Il en va de même lorsque, en dépit d’ordonnances rendues par les tribunaux du Québec, et en raison des demandes de témoins devant leurs autorités locales, les avocats de la demanderesse ont dû recourir aux services d’avocats locaux. Cette solution doit également être retenue quant aux frais payés à certains témoins, que ce soit en raison d’ordonnances des tribunaux locaux ou de conditions posées par les témoins eux-mêmes. Les défendeurs sont d’ailleurs malvenus de s’en plaindre puisque plus de la moitié des commissions rogatoires découlent d’exigences formulées par des témoins à l’égard desquels ils pouvaient exercer un certain contrôle et qui refusaient de se déplacer à Montréal pour y être interrogés.

Le texte intégral de la décision est disponible ici

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