RESPONSABILITÉ: La procureure, qui s’est absentée lors du premier jour de l’audience au fond en vue de procéder dans un autre dossier devant la Régie du logement, a commis une faute, mais non un abus de procédure au sens des articles 54.1 et ss. C.P.C.
Par SOQUIJ, Intelligence juridique
2015EXP-583
Intitulé : Riolo Vaccaro c. Duret, 2015 QCCA 203
Juridiction : Cour d’appel (C.A.), Montréal, 500-09-024056-137
Décision de : Juges Marie-France Bich, Guy Gagnon et Marie St-Pierre
Date : 5 février 2015
Références : SOQUIJ AZ-51147190, 2015EXP-583, J.E. 2015-298 (11 pages)
Résumé
RESPONSABILITÉ — responsabilité professionnelle — avocat — omission de se présenter à l’audience — interprétation des articles 54.1 et ss. C.P.C. — absence d’abus de procédure — manque de jugement — ordonnance en vertu de l’article 46 C.P.C. — équité procédurale — objectif punitif et compensatoire — remboursement — honoraires extrajudiciaires.
PROCÉDURE CIVILE — compétence — Cour supérieure — pouvoirs inhérents — ordonnance en vertu de l’article 46 C.P.C. — omission de se présenter à l’audience — avocat de la partie adverse — remboursement — honoraires extrajudiciaires.
DOMMAGE (ÉVALUATION) — honoraires extrajudiciaires — remboursement — avocat de la partie adverse — omission de se présenter à l’audience — absence d’abus de procédure — manque de jugement — ordonnance en vertu de l’article 46 C.P.C.
Appel d’un jugement de la Cour supérieure ayant condamné l’appelante à verser aux intimés les honoraires extrajudiciaires dus à leur propre avocat pour le temps inutilement passé devant le tribunal le 28 octobre 2013. Rejeté.
Les intimés ont poursuivi les clients de l’appelante. En novembre 2012, la date de l’audience au fond du dossier des parties a été fixée au 28 octobre 2013 pour une durée de quatre jours. L’appelante a accepté de procéder, à la même date, dans un autre dossier devant la Régie du logement. Le 28 octobre, elle ne s’est pas présentée devant la Cour supérieure. Aucune demande écrite de la suspension de l’affaire n’a été adressée au juge présidant le procès. Le lendemain, ce dernier a décidé sommairement que l’appelante avait commis des gestes constituant un abus au sens de l’article 54.1 du Code de procédure civile (C.P.C). Le 31 octobre, après le procès, le juge a entendu la défense de cette dernière. Celui-ci a conclu qu’elle avait fait preuve d’une témérité blâmable et d’un mépris inacceptable à l’égard des règles de procédure. Puisqu’elle avait, par insouciance, fait perdre du temps au tribunal et causé préjudice à la partie adverse, elle a été condamnée à verser aux intimés les honoraires extrajudiciaires dus à leur propre avocat pour le temps inutilement passé devant le tribunal, soit la somme de 2 400 $.
Décision
Même si la faute de l’appelante n’est pas sans conséquence, elle n’atteint pas le niveau de gravité requis pour que l’on puisse parler d’abus au sens de l’article 54.1 C.P.C. Par ailleurs, les articles 54.1 et ss. C.P.C. n’ont pas pour vocation première de réprimer ou de sanctionner les fautes déontologiques de ce genre; ces dispositions visent en principe les parties au litige, et non leurs avocats. Enfin, il faut rappeler que l’erreur est humaine, tout comme l’inadvertance ou l’inattention, de même que le manque ponctuel de jugement, mais il ne s’agit pas d’abus au sens de l’article 54.2 alinéa 2 C.P.C. Cependant, l’avocat qui, sans raison, sans prévenir en temps utile et sans y être autorisé, ne se présente pas devant une cour de justice lorsqu’il y est convoqué commet une faute et doit s’attendre à une sanction, laquelle trouve son assise dans les pouvoirs généraux du tribunal énoncés à l’article 46 C.P.C. Cette sanction est à la fois punitive dans son imposition et compensatoire dans son effet. En l’espèce, la condamnation prononcée contre l’appelante répond à cette exigence procédurale. D’autre part, cette dernière a pu se défendre le 31 octobre, à l’issue du procès, et le juge a alors statué comme s’il reprenant l’affaire de novo. Étant donné que l’appelante a bénéficié du temps nécessaire à la préparation de sa défense, l’équité procédurale a été respectée. Au surplus, le fait qu’elle pratique seule ne peut l’excuser ni justifier sa conduite. Elle n’a respecté ni l’autorité de la Cour supérieure et de ses juges ni le principe de préséance et, en pratique, elle a fait perdre au juge de première instance des heures précieuses. Son comportement fautif a également causé préjudice aux intimés. D’ailleurs, le juge a pu constater le temps perdu par leur avocat, le taux horaire n’a rien d’excessif et les heures réclamées pour la journée du 28 octobre non plus. Bien que la condamnation de 2 400 $ soit sévère, elle n’est pas disproportionnée et ne peut donner prise à réformation.
Instance précédente : Juge Yves Poirier, C.S., Longueuil, 505-17-005367-117, 2013-11-01, 2013 QCCS 5880, SOQUIJ AZ-51021921.
Réf. ant : (C.S., 2013-11-01), 2013 QCCS 5880, SOQUIJ AZ-51021921, 2014EXP-245; (C.A., 2013-12-11), 2013 QCCA 2217, SOQUIJ AZ-51029901.
Le texte intégral de la décision est disponible ici
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