Sélection SOQUIJ – R. c. L.P., 2020 QCCA 1239
Par SOQUIJ, Intelligence juridique
PÉNAL (DROIT) : La
juge de première instance a omis de tenir compte de la vulnérabilité accrue de
la victime et de sa situation personnelle de femme autochtone victime de
violence sexuelle et conjugale en imposant à l’intimé une peine
d’emprisonnement de 2 ans moins 1 jour suivie d’une probation de
3 ans avec suivi pour de graves infractions commises lors de
2 épisodes très intenses de violence conjugale.
2020EXP-2359
Intitulé : R. c. L.P., 2020 QCCA 1239
Juridiction : Cour d’appel (C.A.), Québec
Décision de : Juges Simon Ruel et Suzanne Gagné; France Thibault (diss.)
Date : 25 septembre 2020
Références : SOQUIJ AZ-51710826, 2020EXP-2359 (79 pages)
Résumé
PÉNAL (DROIT) —
détermination de la peine — infractions contre la personne — voies de fait —
voies de fait graves armées — voies de fait causant des lésions corporelles —
séquestration — accusé autochtone — Inuit — victime femme autochtone —
plaidoyer de culpabilité — violence conjugale — violence sexuelle —
intoxication volontaire — gravité de l’infraction — dénonciation — dissuasion —
facteurs systémiques et historiques — application des principes établis
dans R. c. Gladue (C.S. Can., 1999-04-23), SOQUIJ AZ-50061963,
J.E. 99-881, [1999] 1 R.C.S. 688 — facteurs aggravants — mauvais traitement à
l’égard d’un partenaire intime — vulnérabilité de la victime — conséquences
pour la victime — bris de probation — antécédents judiciaires — risque élevé de
récidive — dépendance à l’alcool — absence de responsabilisation — détention —
probation — appel — erreur de principe — substitution de la peine.
PÉNAL (DROIT) —
détermination de la peine — infractions de nature sexuelle — agression sexuelle
— agression sexuelle grave — accusé autochtone — Inuit — victime femme
autochtone — plaidoyer de culpabilité — violence conjugale — intoxication
volontaire — gravité de l’infraction — dénonciation — dissuasion — facteurs
systémiques et historiques — application des principes établis dans R. c.
Gladue (C.S. Can., 1999-04-23), SOQUIJ AZ-50061963, J.E. 99-881,
[1999] 1 R.C.S. 688 — facteurs aggravants — mauvais traitement à l’égard d’un
partenaire intime — vulnérabilité de la victime — conséquences pour la victime
— bris de probation — antécédents judiciaires — risque élevé de récidive —
dépendance à l’alcool — absence de responsabilisation — détention — probation —
appel — erreur de principe — substitution de la peine.
PÉNAL (DROIT) —
détermination de la peine — principes généraux — facteurs à prendre en
considération — autochtone — victime femme autochtone — violence conjugale —
violence sexuelle — mauvais traitement à l’égard d’un partenaire intime —
vulnérabilité de la victime — vulnérabilité accrue — dénonciation — dissuasion
— facteurs systémiques et historiques — application des principes établis
dans R. c. Gladue (C.S. Can., 1999-04-23), SOQUIJ AZ-50061963,
J.E. 99-881, [1999] 1 R.C.S. 688 — mise en balance des facteurs — protection du
public — protection de la victime — examen des sanctions substitutives pour les
délinquants autochtones — détention — probation — surveillance — conditions —
calcul du temps passé en détention provisoire.
Requête pour permission d’appel.
Accueillie. Appel de la peine. Accueilli, avec dissidence.
Le ministère public demande
l’autorisation d’interjeter appel de la peine d’emprisonnement de 2 ans
moins 1 jour suivie d’une probation de 3 ans avec surveillance
imposée à l’intimé, un Inuit du Nunavik s’étant reconnu coupable sous 7 chefs
d’accusation de voies de fait armées, de voies de fait causant des lésions
corporelles, d’agression sexuelle grave, de séquestration et d’omission de se
conformer à une ordonnance de probation. Ces infractions ont été commises lors
de 2 épisodes très intenses de violence conjugale au cours desquels
l’intimé était intoxiqué par l’alcool. Ce dernier possède de nombreux
antécédents judiciaires en lien avec des infractions de violence à l’égard de
la victime, qui en a subi de graves conséquences physiques et psychologiques.
Décision
M. le juge Ruel: La juge de première instance a commis des erreurs
de principe: 1) en omettant de prendre en considération la vulnérabilité
accrue de la victime et sa situation personnelle de femme autochtone victime de
violence conjugale et en n’accordant pas un poids suffisant à celles-ci;
2) en minimisant indûment le risque de récidive de l’intimé et la
nécessité de l’isoler pour assurer la protection de la victime; et 3) en
prenant en considération l’intoxication de l’intimé au moment de la commission
des crimes à titre de facteur atténuant, compte tenu de son absence de
responsabilisation à cet égard. Ces erreurs ont eu une répercussion directe sur
la peine imposée.
Le juge qui impose une peine à un délinquant autochtone doit appliquer le cadre
d’analyse établi dans R. c. Gladue (C.S. Can., 1999-04-23),
SOQUIJ AZ-50061963, J.E. 99-881, [1999] 1 R.C.S. 688, lequel lui impose de
prendre en considération les facteurs systémiques ou historiques pouvant être à
la source de sa criminalité ainsi que les types de procédures de détermination
de la peine et de sanctions qui, dans les circonstances, peuvent être
appropriées en raison de leur héritage ou de leurs attaches autochtones.
L’article 718.2 e) du Code criminel (C.Cr.) énonce que le
juge doit examiner les sanctions substitutives qui sont raisonnables dans les
circonstances et qui tiennent compte du tort causé aux victimes ou à la
collectivité. Si la victime est une femme autochtone, le juge doit privilégier
les objectifs de dissuasion et de dénonciation (art. 718.04 C.Cr.) ainsi
que tenir compte de la vulnérabilité accrue de celle-ci (art. 718.201
C.Cr.) dans un contexte de violence conjugale. Par ailleurs, les principes de
la détermination de la peine pour les délinquants autochtones doivent être pondérés
avec la nécessité de prendre en considération les circonstances historiques et
systémiques particulières aux femmes autochtones victimes de violence sexuelle
et conjugale.
Une peine totale de 44 mois d’emprisonnement (16,4 mois après le
crédit accordé pour la détention provisoire) suivie d’une période de probation
de 3 ans est juste et appropriée en l’espèce, compte tenu de la
vulnérabilité accrue de la victime, une femme inuite, du nombre d’événements
graves et répétés de violence conjugale, du risque élevé de récidive de
l’intimé, des objectifs de dissuasion et de dénonciation ainsi que de la
nécessité d’isoler l’intimé pour assurer la protection de la victime et de la
société.
Mme la juge Thibault, dissidente: La peine imposée par
la juge de première instance peut être qualifiée de clémente, mais elle ne
constitue pas une peine manifestement non indiquée au regard des circonstances
particulières et du droit applicable. Elle respecte les enseignements de la
Cour suprême dans Gladue et dans R. c. Ipeelee (C.S.
Can., 2012-03-23), 2012 CSC 13, SOQUIJ AZ-50841754, 2012EXP-1208, J.E.
2012-661, [2012] 1 R.C.S. 433, et elle tient compte des objectifs et des
principes pénologiques pertinents applicables en matière de crimes commis à
l’endroit d’une partenaire intime vulnérable et autochtone. Ainsi, la juge n’a
commis aucune erreur de principe ayant eu une incidence sur la peine imposée.
Instance précédente : Juge Peggy Warolin, C.Q., Chambre criminelle et pénale, Baie d’Hudson,
640-01-040147-184 et autres, 2019-10-25, 2019 QCCQ 8755, SOQUIJ AZ-51667245.
Réf. ant : (C.Q., 2019-10-25), 2019 QCCQ 8755, SOQUIJ AZ-51667245.
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