Sommaire de la Cour d’appel : Abandonato c. Corporation Steckmar, 2022 QCCA 1405
Par SOQUIJ, Intelligence juridique
COMPAGNIES : Alors que les parties ont choisi consciemment de détenir leurs projets immobiliers par l’intermédiaire d’un prête-nom plutôt que directement ou au moyen d’une société dont elles étaient actionnaires, elles ne peuvent introduire un recours en redressement.
2022EXP-2686
Intitulé : Abandonato c. Corporation Steckmar, 2022 QCCA 1405
Juridiction : Cour d’appel (C.A.), Montréal
Décision de : Juges Martin Vauclair, Patrick Healy et Stephen W. Hamilton
Date : 18 octobre 2022
Références : SOQUIJ AZ-51887079, 2022EXP-2686 (33 pages)
–Résumé
COMPAGNIES — actionnaire — recours en redressement — demande d’enquête — ordonnance — états financiers vérifiés — prête-nom — convention d’indivision — mandat — projet immobilier — intérêt juridique — attentes raisonnables — attentes ne découlant pas du statut d’actionnaire, mais plutôt du statut de mandants et de propriétaires des immeubles— fardeau de la preuve — absence de preuve prima facie.
COMPAGNIES — protection des intérêts minoritaires — recours en redressement — demande d’enquête — ordonnance — états financiers vérifiés — prête-nom — convention d’indivision — mandat — projet immobilier — intérêt juridique — interprétation des articles 421 alinéa 1 et 439 paragraphe 3 de la Loi sur les sociétés par actions — notion de «même groupe» — attentes raisonnables — attentes ne découlant pas du statut d’actionnaire, mais plutôt du statut de mandants et de propriétaires des immeubles— fardeau de la preuve — absence de preuve prima facie.
Appels d’un jugement de la Cour supérieure ayant rejeté des demandes d’enquête et ayant ordonné la préparation d’états financiers vérifiés. L’appel principal est accueilli et l’appel incident est rejeté.
L’appelant Abandonato et l’intimé Steckler sont des partenaires d’affaires dans le cadre de projets immobiliers. Ils utilisent des ententes de prête-noms et des conventions d’indivision par lesquelles des sociétés prête-noms sont désignées comme les propriétaires inscrits des immeubles, alors que ce sont eux qui détiennent des droits sur les éléments d’actif des sociétés.
La juge de première instance était appelée à statuer sur le droit des actionnaires et des propriétaires indivis qui sont bénéficiaires de sociétés prête-noms d’obtenir une enquête ou des états financiers vérifiés à l’égard de celles-ci dans le cadre d’une demande d’enquête ou d’une demande en redressement pour abus de pouvoir ou pour iniquité en vertu de la Loi sur les sociétés par actions.
Décision
M. le juge Hamilton: En ce qui concerne les sociétés prête-noms dont les intimés sont actionnaires, outre leur droit d’obtenir les états financiers vérifiés à ce titre, les intimés bénéficient tous des droits contractuels prévus dans les contrats de prête-noms et d’indivision ainsi que des recours du mandant. La juge n’a pas commis d’erreur lorsqu’elle a rejeté une demande d’enquête fondée sur l’article 421 de la loi. Même si les intimés pouvaient présenter une telle demande, l’existence de l’une des situations y donnant ouverture n’a pas été établie prima facie. Les malversations effectuées par d’autres sociétés étaient en effet insuffisantes pour justifier des demandes d’enquête visant toutes les autres sociétés leur étant liées de près ou de loin. En outre, la justification d’une demande d’enquête à ce stade n’a pas été établie, et ce, compte tenu des coûts et des bénéfices espérés.
Quant à la possibilité d’accorder une mesure de redressement en vertu de l’article 451 de la loi, la juge n’a analysé ni les attentes raisonnables des intimés ni l’abus des appelantes, mais cette erreur n’était pas déterminante. Les attentes raisonnables des intimés ne découlaient pas de leur statut d’actionnaires, mais plutôt de leur statut de mandants et de propriétaires des immeubles. De plus, d’autres recours s’offraient aux intimés, dont la préparation d’états financiers vérifiés et la reddition de comptes.
En ce qui a trait aux sociétés prête-noms et à la société fiduciaire dont les intimés ne sont pas actionnaires, même si l’article 421 alinéa 1 de la loi permet à l’actionnaire d’une société de demander une enquête sur celle-ci ou sur toute société du même groupe, la notion de «même groupe» ne trouve pas application en l’espèce. Quant à la demande de redressement, la juge n’a pas commis d’erreur dans son interprétation de l’article 439 paragraphe 3 de la loi, lequel précise les personnes qui peuvent faire une telle demande. En examinant les contrats de prête-noms et d’indivision, la juge a conclu que les intimés étaient suffisamment «à l’intérieur» de 2 des sociétés en cause pour bénéficier du recours en redressement. Ce critère semble approprié: il donne un sens à l’article 439 paragraphe 3 tout en respectant la nature du recours en redressement. Or, les intimés ne remplissaient pas ce critère. Les parties ont choisi consciemment de détenir les projets par l’intermédiaire d’un prête-nom plutôt que de les détenir directement ou au moyen d’une société dont elles étaient actionnaires. Elles ne peuvent donc prétendre être suffisamment à l’intérieur des sociétés, alors qu’elles ont adopté une structure qui les garde à l’extérieur. Enfin, même si le statut de demandeur leur était accordé, la conduite dont elles se plaignent est liée à leur qualité de mandant ou de bénéficiaire, et elles ont la possibilité de se prévaloir de l’action en reddition de comptes sous le régime de droit commun.
Instance précédente : Juge Chantal Corriveau, C.S., Montréal, 500-11-051592-166, 2019-06-11, 2019 QCCS 2356, SOQUIJ AZ-51604558.
Réf. ant : C.S., 2019-06-11), 2019 QCCS 2356, SOQUIJ AZ-51604558, 2019EXP-1967; (C.A., 2020-01-20), 2020 QCCA 113, SOQUIJ AZ-51663300.
Le texte intégral de la décision est disponible ici.
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