SÉLECTION SOQUIJ : Pierre c. R., 2023 QCCA 84
Par SOQUIJ, Intelligence juridique
PÉNAL (DROIT) : Imposant une peine d’emprisonnement de 4 ans à l’appelant, malgré les conséquences que ce dernier pourra subir en matière d’immigration, d’autant moins que, compte tenu de la nature du crime et de l’âge de la victime au moment de sa commission, l’article 718.01 C.Cr. imposait à la juge d’accorder une attention particulière aux objectifs de dénonciation et de dissuasion.
2023EXP-337**
Intitulé : Pierre c. R., 2023 QCCA 84
Juridiction : Cour d’appel (C.A.), Montréal
Décision de : Juges Jacques J. Levesque, Stephen W. Hamilton et Michel Beaupré
Date : 23 janvier 2023
Références : : SOQUIJ AZ-51908734, 2023EXP-337 (28 pages)
–Résumé
PÉNAL (DROIT) — détermination de la peine — infractions de nature sexuelle — agression sexuelle — adolescente — victime âgée de 14 ans — accusé âgé de 26 ans — facteurs atténuants — remords — thérapie — facteur aggravant — abus de confiance — fourchette de peines — pouvoir discrétionnaire — infraction commise en 2012 — application de R. c. Friesen (C.S. Can., 2019-10-16), 2020 CSC 9, SOQUIJ AZ-51680674, 2020EXP-902 — conséquences indirectes de la peine — conséquence sur le plan de l’immigration — mesure de renvoi — détention — appel — absence d’erreur.
PÉNAL (DROIT) — détermination de la peine — principes généraux — facteurs à prendre en considération — conséquences indirectes de la peine — statut d’immigrant — conséquence sur le plan de l’immigration — mesure de renvoi — demande d’examen des risques avant renvoi — agression sexuelle — détention.
IMMIGRATION ET CITOYENNETÉ — divers — statut d’immigrant — déclaration de culpabilité — agression sexuelle — détention — conséquences indirectes de la peine — peine maximale — grande criminalité — mesure de renvoi — demande d’examen des risques avant renvoi.
Appel de la peine. Rejeté.
L’appelant a plaidé coupable sous 1 chef d’accusation d’agression sexuelle à l’endroit d’une adolescente de 14 ans alors qu’il était âgé de 26 ans. L’infraction commise en 2012 était passible d’une peine maximale de 10 ans, laquelle a été augmentée à 14 ans en 2015. En 2021, l’appelant s’est vu imposer une peine d’emprisonnement de 4 ans. Il fait valoir que la juge de première instance a commis des erreurs dans la détermination de la peine et que cette dernière est manifestement non indiquée.
Décision
L’argument voulant que la juge ait omis de tenir compte des remords et de l’introspection de l’appelant n’est pas retenu. Bien que la juge ne les mentionne pas expressément à titre de facteurs atténuants, elle a bel et bien pris en considération les remords exprimés par l’appelant et la démarche thérapeutique qu’il avait entreprise. En réalité, ce dernier remet en question l’insuffisance du poids donné par la juge à ces facteurs. Or, la décision d’accorder plus ou moins d’importance à des circonstances aggravantes ou atténuantes relève du pouvoir discrétionnaire du juge. Étant donné le spectre élargi des situations possibles d’abus de confiance et d’autorité, l’appelant échoue à démontrer que la juge a commis une erreur en retenant l’abus de confiance à titre de facteur aggravant. La victime et l’appelant n’étaient pas des inconnus. Ils ont entretenu une relation constituée d’abord d’échanges virtuels, puis d’appels téléphoniques fréquents pendant 2 à 3 mois avant l’agression. Les relations sexuelles entre un adulte et un adolescent sont intrinsèquement un acte d’exploitation en raison du manque de maturité, de jugement et d’expérience de ce dernier.
L’analyse effectuée par la juge à l’égard de la jurisprudence antérieure et postérieure à l’arrêt R. c. Friesen (C.S. Can., 2019-10-16), 2020 CSC 9, SOQUIJ AZ-51680674, 2020EXP-902, est à l’abri de toute intervention. La juge a respecté la méthode de détermination de la peine expliquée dans R. c. Nasogaluak (C.S. Can., 2010-02-19), 2010 CSC 6, SOQUIJ AZ-50609170, 2010EXP-739, J.E. 2010-403, [2010] 1 R.C.S. 206, elle a traité des fourchettes de peines applicables et elle a expliqué son évaluation des peines antérieures et postérieures à Friesen. L’arrêt R. c. Parranto (C.S. Can., 2021-11-12), 2021 CSC 46, SOQUIJ AZ-51808117, 2021EXP-2759, d’une part, a renforcé le pouvoir discrétionnaire du juge chargé de la détermination de la peine et, d’autre part, a traité du rôle des fourchettes dans le contexte de cet exercice ainsi que de la norme d’intervention en appel.
En l’espèce, la juge n’a pas commis d’erreur en imposant une peine d’emprisonnement de 4 ans à l’appelant, malgré les conséquences que ce dernier pourra subir en matière d’immigration. La déclaration de culpabilité emporte une interdiction de territoire pour grande criminalité et l’appelant fait face à une mesure de renvoi. Sa situation est visée par les articles 36, 112 (3) b) et 113 d) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, de sorte que sa demande d’examen avant renvoi sera évaluée par les autorités fédérales en fonction des critères mentionnés à l’article 97 de la loi et en tenant compte de la peine que la juge lui a imposée. Le fait que l’appelant soit interdit de territoire et contraint de demander la protection du ministre résulte de la grande criminalité associée à la peine maximale rattachée au crime auquel il a décidé de plaider coupable. Celui-ci tente d’élever les conséquences indirectes de la peine au rang de facteur prédominant, alors que celles-ci doivent plutôt être prises en considération avec les autres critères applicables et ne doivent pas dénaturer le processus de détermination.
Instance précédente : Juge Nathalie Duchesneau, C.Q., Chambre criminelle et pénale, Montréal, 500-01-088674-137, 2021-03-25, 2021 QCCQ 2024, SOQUIJ AZ-51754620.
Réf. ant : (C.Q., 2019-10-24), 2019 QCCQ 6539, SOQUIJ AZ-51638823; (C.Q., 2021-03-25), 2021 QCCQ 2024, SOQUIJ AZ-51754620, 2021EXP-1437; (C.A., 2021-10-08), 2021 QCCA 1498, SOQUIJ AZ-51799967.
Le texte intégral de la décision est disponible ici
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