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SOQUIJ
Intelligence juridique
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27 Juin 2023

Sommaire de la Cour d’appel : Procureur général du Québec c. Terroux, 2023 QCCA 731

Par SOQUIJ, Intelligence juridique

PÉNAL (DROIT) : La peine de 90 jours d’emprisonnement à purger de façon discontinue imposée sous les chefs de possession de matériel de pornographie juvénile et d’accès à un tel matériel est manifestement non indiquée; le juge de première instance a erré en indiquant que le nombre d’images et leur nature constituaient une circonstance atténuante.

2023EXP-1508***

Intitulé : Procureur général du Québec c. Terroux, 2023 QCCA 731

Juridiction : Cour d’appel (C.A.), Québec

Décision de : Juges Martin Vauclair, Simon Ruel et Frédéric Bachand

Date : 6 juin 2023

Références : SOQUIJ AZ-51944041, 2023EXP-1508 (77 pages)

Résumé

PÉNAL (DROIT) — détermination de la peine — infractions de nature sexuelle — publications obscènes — possession de matériel de pornographie juvénile — accès à du matériel de pornographie juvénile — facteurs atténuants — nombre de fichiers — nature des fichiers — détention — peine discontinue — appel — erreur de principe — peine manifestement non indiquée — substitution de la peine — réincarcération — peine minimale — articles 163.1 (4) a) et 163.1 (4.1) a) C.Cr. — protection contre tous traitements ou peines cruels et inusités — revue de la jurisprudence — situation hypothétique — application raisonnablement prévisible de la disposition à d’autres personnes — invalidité constitutionnelle — déclaration d’inopérabilité constitutionnelle.

PÉNAL (DROIT) — détermination de la peine — principes généraux — ordonnances — ordonnance de se conformer à la Loi sur l’enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels — ordonnance obligatoire — durée de l’ordonnance — perpétuité — possession de matériel de pornographie juvénile — accès à du matériel de pornographie juvénile — Thériault c. R. (C.A., 2009-01-30 (jugement rectifié le 2009-02-16)), 2009 QCCA 185, SOQUIJ AZ-50534406 — modification législative — règle du stare decisis — appel — application de R. c. Ndhlovu (C.S. Can., 2022-10-28), 2022 CSC 38, SOQUIJ AZ-51889195, 2022EXP-2707 — article 490.013 (2.1) C.Cr. — déclaration d’inopérabilité constitutionnelle.

PÉNAL (DROIT) — détermination de la peine — principes généraux — les peines et la Charte canadienne des droits et libertés — protection contre tous traitements ou peines cruels et inusités — peine minimale — articles 163.1 (4) a) et 163.1 (4.1) a) C.Cr. — possession de matériel de pornographie juvénile — accès à du matériel de pornographie juvénile — situation hypothétique — revue de la jurisprudence — application raisonnablement prévisible de la disposition à d’autres personnes — invalidité constitutionnelle — déclaration d’inopérabilité constitutionnelle.

PÉNAL (DROIT) — garanties fondamentales du processus pénal — protection contre tous traitements ou peines cruels et inusités — peine minimale — articles 163.1 (4) a) et 163.1 (4.1) a) C.Cr. — possession de matériel de pornographie juvénile — accès à du matériel de pornographie juvénile — situation hypothétique — revue de la jurisprudence — application raisonnablement prévisible de la disposition à d’autres personnes — invalidité constitutionnelle — déclaration d’inopérabilité constitutionnelle.

DROITS ET LIBERTÉS — droits judiciaires — protection contre tous traitements ou peines cruels et inusités — peine minimale — articles 163.1 (4) a) et 163.1 (4.1) a) C.Cr. — possession de matériel de pornographie juvénile — accès à du matériel de pornographie juvénile — situation hypothétique — revue de la jurisprudence — application raisonnablement prévisible de la disposition à d’autres personnes — invalidité constitutionnelle — déclaration d’inopérabilité constitutionnelle.

DROITS ET LIBERTÉS — réparation du préjudice — déclaration d’inopérabilité constitutionnelle — protection contre tous traitements ou peines cruels et inusités — peine minimale — articles 163.1 (4) a) et 163.1 (4.1) a) C.Cr. — possession de matériel de pornographie juvénile — accès à du matériel de pornographie juvénile — situation hypothétique — revue de la jurisprudence — application raisonnablement prévisible de la disposition à d’autres personnes — invalidité constitutionnelle.

Requêtes pour permissions d’interjeter appel des peines. Accueillies. Appels de peines. Rejeté dans le dossier 200-10-003752-206, avec dissidence. Accueilli dans le dossier 200-10-003750-200, avec dissidence; une peine de 12 mois d’emprisonnement est substituée à la peine de 90 jours d’emprisonnement à purger de façon discontinue imposée en première instance. Les peines minimales prévues aux articles 163.1 (4) a) et 163.1 (4.1) a) du Code criminel (C.Cr.) sont déclarées constitutionnellement inopérantes.

Le procureur général du Québec cherche à faire infirmer les jugements rendus dans 7 dossiers, lesquels ont prononcé l’inapplicabilité aux intimés de l’obligation d’inscription au registre national des délinquants sexuels et de s’y soumettre à perpétuité suivant les dispositions de la Loi sur l’enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels. Il conteste aussi 2 jugements ayant prononcé l’inapplicabilité des peines minimales prévues pour les infractions de possession de matériel de pornographie juvénile et d’accès à celui-ci.

Décision
La constitutionnalité du registre national des délinquants sexuels

Bien que l’arrêt Thériault c. R. (C.A., 2009-01-30 (jugement rectifié le 2009-02-16)), 2009 QCCA 185, SOQUIJ AZ-50534406, ait conclu que les obligations liées au registre national des délinquants sexuels n’étaient pas une peine, il était légitime pour les juges de première instance de revoir les fondements de cet arrêt à la lumière des changements législatifs et des arrêts plus récents. En l’espèce, les intimés sont visés par une ordonnance à perpétuité en vertu de l’article 490.013 (2.1) C.Cr., et cette disposition a été déclarée inopérante par l’arrêt R. c. Ndhlovu (C.S. Can., 2022-10-28), 2022 CSC 38, SOQUIJ AZ-51889195, 2022EXP-2707. Les intimés seront donc soumis à une période inférieure. Cette question est devenue sans objet.

La constitutionnalité des peines minimales

Les dossiers des intimés Senneville et Naud soulèvent la question de la constitutionnalité des peines minimales prévues aux articles 163.1 (4) a) et 163.1 (4.1) a) C.Cr. Il n’y a aucune preuve pour soutenir une justification en vertu de l’article premier de la Charte canadienne des droits et libertés. Le juge a constaté que plusieurs décisions, lesquelles étaient également des scénarios raisonnables envisagés dans les avis de contestation, ont conclu que les peines minimales étaient contraires à l’article 12 de la charte. L’argument voulant que les cas répertoriés ne soient pas des scénarios hypothétiques raisonnables est rejeté. La constance avec laquelle les tribunaux québécois ont invalidé les peines minimales en cause était pertinente. Le juge a répondu aux volets de la disproportion exagérée, abordés subséquemment dans l’arrêt R. c. Hills (C.S. Can., 2023-01-27), 2023 CSC 2, SOQUIJ AZ-51909661, 2023EXP-285, sans les nommer. Les peines minimales de 1 an d’emprisonnement prévues pour les infractions de possession de matériel de pornographie juvénile et d’accès à celui-ci sont déclarées inconstitutionnelles et inopérantes, car elles sont contraires à l’article 12 de la charte.

M. le juge Ruel, dissident: Les déclarations quant au caractère inopérant et inconstitutionnel des peines minimales auraient dû être cassées.

Les peines appropriées

L’intimé Senneville s’est vu imposer une peine de 90 jours d’emprisonnement à purger de façon discontinue sous des chefs de possession de matériel de pornographie juvénile et d’accès à celui-ci. Le juge a erré en droit en indiquant que le nombre et la nature des images constituaient une circonstance atténuante. Il a commis une erreur de principe en appliquant une méthode de calcul mathématique, avec pour variables le nombre d’images, la durée de l’infraction et la peine imposée par rapport aux circonstances décrites dans R. c. Régnier (C.A., 2018-03-01), 2018 QCCA 306, SOQUIJ AZ-51472848, 2018EXP-663. La peine imposée est manifestement non indiquée. Il y a lieu d’imposer à l’intimé Senneville la peine minimale de 12 mois d’emprisonnement. Le reliquat de la peine devant être purgée étant de 9 mois, la réincarcération ne lui causerait pas une injustice.

M. le juge Vauclair, dissident: L’appel aurait dû être rejeté.

L’intimé Naud s’est vu imposer une peine de 9 mois d’emprisonnement sous 1 chef de possession de matériel de pornographie juvénile. Dans les circonstances particulières de l’affaire, la différence de 3 mois entre la peine minimale et la peine imposée ne suffit pas pour constater une violation de l’article 12 de la charte.

M. le juge Ruel, dissident: L’appel aurait dû être accueilli et la peine minimale aurait dû être imposée à l’intimé.

Instance précédente : Juge Mario Tremblay, juge Johanne Roy, C.Q., Chambre criminelle et pénale, Québec, 200-01-207959-176 et autres, 2020-01-13, 2020-03-13 et 2020-03-13, 2020 QCCQ 13471, 2020 QCCQ 1202, et 2020 QCCQ 1204, SOQUIJ AZ-51766668, SOQUIJ AZ-51679156 et SOQUIJ AZ-51679158.

Réf. ant : (C.Q., 2018-10-01), 2018 QCCQ 13444, SOQUIJ AZ-51610535; (C.A., 2019-12-02), 2019 QCCA 2097, SOQUIJ AZ-51649925; (C.Q., 2020-03-13), 2020 QCCQ 1202, SOQUIJ AZ-51679156, 2020EXP-1173; (C.Q., 2020-03-13), 2020 QCCQ 1204, SOQUIJ AZ-51679158, 2020EXP-1477; (C.A., 2020-04-15), 2020 QCCA 574, SOQUIJ AZ-51682569; (C.A., 2020-07-09), 2020 QCCA 918, SOQUIJ AZ-51694591.

Le texte intégral de la décision est disponible ici

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